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Pour résoudre en toute rigueur la question de stabilité il ne reste qu’à savoir si les nouvelles séries sont ou non convergentes. Là paraissait être le nœud du problème, car, avant Poincaré, tous les astronomes croyaient qu’une fonction représentée par une série trigonométrique absolument convergente ne peut croître au delà de toute limite. Poincaré montre que, pour classique qu’elle soit, cette opinion est erronée, et que quand même on serait arrivé à représenter les coordonnés des astres par de pareilles séries trigonométriques convergentes, ce qui n’était de loin pas le cas de celles qu’avait employées Laplace, on n’aurait pas démontré la stabilité du système solaire. Par tous ces résultats superbes qui sont comme le couronnement de trois siècles de recherches incessantes, la postérité placera certainement Les méthodes nouvelles de la mécanique céleste à côté des immortels Principes de Newton. Toutes les recherches faites à l’avenir dans ce domaine devront avant tout s’appuyer sur les solides fondemens posés par Poincaré.

La mécanique céleste ne considère en général les astres que comme des êtres assimilables à des points matériels pesans. Elle oublie d’autres modalités de ces êtres, évidemment négligeables à côté de l’attraction newtonienne, mais dont les effets accumulés peuvent avec le siècle devenir importans pour la stabilité des systèmes astraux. Attaquant la question de ce point de vue nouveau, Poincaré a montré finalement que, parmi ces forces physiques qui tendent à modifier les orbites, il en est trois, prépondérantes, la résistance si faible qu’elle soit du milieu interplanétaire, les marées que les planètes et la masse solaire produisent réciproquement les unes sur les autres et enfin le magnétisme des planètes, dont l’effet accumulé sera plus tard de précipiter toutes les planètes et leurs satellites dans le soleil. C’est ainsi que finira notre système. Sera-ce là la cause de la disparition de l’humanité ? Non certes, car il est bien probable que d’autres événemens auront depuis longtemps anéanti toute vie terrestre le jour où, — si j’ose ainsi parler car il n’y aura plus de jours alors, la terre présentant sans cesse la même face au soleil — cette petite catastrophe cosmique aura lieu. Bien des raisons conduisent en effet à penser qu’infinitésimale dans le passé à côté de la durée de son support planétaire, l’existence de l’humanité le sera également dans l’avenir.