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par l’empereur Shomû Ier (746). On peut encore y admirer de nos jours des étoffes sassanides ornées de scènes de chasse royales, de lions et de rosaces ; des verreries, des objets en argent de provenance occidentale.

Les traditions indo-grecques sont surtout reconnaissables dans les célèbres peintures du Kondô (ou temple d’or) d’Horyûji qu’on a pu comparer aux fresques découvertes dans la salle centrale du palais d’Adschantâ (Ve au VIIe siècle après J.-C.) dans le Nizam indien. La légende veut que ces peintures aient été exécutées par le prêtre coréen Donshô qui débarqua au Japon en l’an 600, mais rien ne parait devoir légitimer cette hypothèse. Le Kondô, dont l’édification datait des premières années du VIIe siècle, fut en effet détruit par un incendie en 670 et dut être restauré, — peut-être même entièrement reconstruit durant le nengô Wadô (708-715). C’est probablement de cette époque que datent les fresques. Les figures y ont été d’abord dessinées au trait avant l’application des couleurs. Celles-ci diffèrent sensiblement de l’enluminure des écoles bouddhiques postérieures et semblent correspondre à des procédés oubliés depuis. Les verts, les rouges, les bruns et les jaunes tournés aux tons neutres et ternis par le temps y dominent. L’aspect des divinités est plus vivant, moins hiératisé que celui des images dues aux époques suivantes, les profils sont droits, les yeux horizontaux, les gestes pleins d’élégance. L’influence de l’Inde se fait en outre sentir dans les déhanchemens nettement prononcés, l’allongement canonique des oreilles, l’addition d’une fine moustache à la lèvre supérieure de certains Bodhisattvas (Kokka, n° 192, mai 1906). Sur les auréoles on peut distinguer des motifs analogues à ceux des décorations architecturales du temps d’Azoka (fleurs de lotus stylisées) et ailleurs des feuilles ressemblant fort à l’acanthe grecque. M. Cl. E. Maitre, dans sa très attachante étude sur « l’art du Yamato, » a fait, d’autre part, remarquer que « certains détails révèlent du moins que ces fresques ne sont pas purement hindoues : c’est ainsi que les Bouddhas y sont représentés parfois l’épaule droite à demi recouverte d’un pli d’étoffe, alors que, dans l’iconographie de l’Inde, l’épaule est toujours vue entièrement nue ou complètement cachée par une robe prenant au cou. » Les ombres sont marquées par des épaississemens et des traits plus foncés des contours. On note déjà l’emploi de conventions qui subsisteront longtemps dans l’art religieux, par