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l’eau ordinaire, puis on les stérilise avec de l’eau contenant quelques gouttes d’eau oxygénée commerciale, et le liquide désinfectant passe ainsi de bidon en bidon. On s’est préoccupé de ce rinçage à l’eau oxygénée diluée et on s’est demandé si ce réactif, renfermant quelquefois des traces d’acide chlorhydrique ou sulfurique, ne risque pas de souiller plus tard le lait introduit dans le récipient. Mais le Conseil supérieur d’hygiène a estimé avec raison que les très faibles proportions du réactif ou de ses impuretés susceptibles de passer dans le lait ne présentaient aucun inconvénient sérieux. A partir de quatre heures du matin, les bidons, bien propres et égouttés, sont emportés par des carrioles qui les emmènent vides dans les fermes et les rapportent pleins. A mesure qu’ils arrivent dans une ferme, les bidons recueillent le lait trait la veille au soir aussi bien que celui qui, tout chaud, a été récemment exprimé du pis ; le premier, au moins dans les petits exploitations, a passé la nuit dans des vases plus ou moins nets, plus ou moins bien bouchés et renferme quelquefois un nombre formidable de germes ; dans les grands vacheries, on le conserve dans des bidons nettoyés et obturés qu’on livre avec leur contenu en échange du récipient vide, et les conditions sont meilleures, comme toujours pour le lait du matin, qui n’a pas le temps de se contaminer.

Vers huit heures et demie, à l’heure où beaucoup de futurs consommateurs sont à peine levés, le « ramassage » est fini et le dépôt concentre tout le lait des environs : mettons un millier de litres. On décharge les bidons et l’on goûte leur contenu, éliminant ceux dont la saveur laisse à désirer. Alors intervient un filtrage rudimentaire sur un tamis de toile de coton qui élimine les poils, les brins de paille, etc.

Rassurons maintenant les gens timorés : c’est le moment de la pasteurisation à 70° ; après quoi, le lait est refroidi « avec de l’eau » de puits fraîche, par contact bien entendu, et expédié sur Paris dans des bidons propres, ordinairement nettoyés avec de l’eau oxygénée et souvent réfrigérés. Tel est du moins le règlement d’hiver, car, en été, on procède à un second ramassage dans l’après-midi et à un second traitement le soir.

Voyageant dans le courant de l’après-midi, le lait arrive à Paris le soir plus ou moins tard, et il est mis en vente le matin de très bonne heure, de sorte qu’entre la traite et la consommation il s’écoule parfois jusqu’à 30 heures.