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du déambulatoire de Saint-Sernin. C’est le même visage régulier et sans expression : c’est la même simplification des plis qui forment des lignes parallèles et peu accentuées, comme si le vêtement était collé au corps ; c’est la même altitude et la même expression d’hiératisme. De même il y a des ressemblances évidentes entre les statues de saints adossées au portail de l’église Saint-Just de Valcabrère (Haute-Garonne) et certains bustes-reliquaires de bois, tels que le saint Baudime du trésor de Saint-Nectaire (Puy-de-Dôme) ou le saint Chaffre de l’église du Monastier (Haute-Loire). Avec leurs cheveux bouclés et ondulés sur le front, par la fixité de leur regard, les statues de Valcabrère ressemblent à des agrandissemens en pierre des bustes-reliquaires de saints.

C’est à l’Auvergne qu’appartient aussi le moine-sculpteur de la Chaise-Dieu, Guinamond, dont la réputation était telle qu’il fut chargé en 1077 par le chapitre de Périgueux d’exécuter le tombeau de saint Front. Enfin c’est à l’atelier toulousain que l’on doit les premières manifestations d’une sculpture moins barbare. Gilabert, qui sculpta deux des apôtres de l’ancienne porte de Saint-Etienne de Toulouse et qui a transmis son nom avec orgueil à la postérité, peut être regardé comme un des créateurs du naturalisme. Tous ces faits montrent bien que ce fut dans le midi de la France que la statuaire et la sculpture monumentale reparurent tout d’abord.

L’examen des conditions dans lesquelles s’est développée la sculpture dans les pays du Nord entre le VIIIe et le XIIe siècle vient confirmer cette conclusion. Il serait certainement trop absolu de soutenir que le relief y fut complètement abandonné pendant cette période. Nous savons par Bernard d’Angers que les crucifix en relief y étaient en usage. Il est même possible que certains ateliers aient exécuté des statuettes de métal de petite dimension, mais sans aucun caractère religieux. Tout le monde connaît la curieuse statuette de bronze du musée Carnavalet qui provient du trésor de la cathédrale de Metz et passe pour représenter Charlemagne. Bien que l’on ait voulu en faire une œuvre de la Renaissance, la ressemblance qu’elle présente avec les effigies princières des miniatures carolingiennes ou avec la fameuse mosaïque de Saint-Jean de Latran semble bien la dater du IXe siècle. Quelques fragmens du décor de la basilique d’Aix-la-Chapelle, les mufles de lion qui décorent les portes de