Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 10.djvu/604

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que Dieu aidera. » Pour que Dieu aidât, Windthorst aidait. Il noua partie avec les conservateurs, comme un mois plus tôt, au Reichstag, il nouait partie avec les progressistes ; il disposait dans la Commission, grâce à cette alliance, de 11 voix sur 21 ; il était souverain, Gossler eut à comparaître ; et Windthorst lui demanda si Schloezer traitait à Rome de la révision des lois de Mai, et si le gouvernement projetait celle révision pour une date prochaine. « Schloezer, expliqua le ministre, a des pouvoirs pour négocier avec la Curie au sujet du présent projet de loi ; si les pourparlers marchent bien, il est à prévoir qu’il aura des pouvoirs pour des pourparlers plus étendus. Le fait que nous réglons, par une législation unilatérale, la frontière entre l’Etat et l’Eglise, n’exclut pas cet autre fait, d’une entente matérielle avec la Curie. Pour l’instant, le gouvernement ne peut pas dépasser les concessions contenues dans le projet. » Windthorst riposta, résuma les explications de dossier en disant qu’il n’y avait pas à compter sur une révision fondamentale des lois. La Commission travailla lentement. Il advint au projet gouvernemental la même destinée qu’au projet de 1880 : il fut rendu méconnaissable. Windthorst s’arrangeait pour faire traîner la besogne. Avant de prendre position au sujet des articles 4 et 5, relatifs à l’ingérence de l’Etat dans la collation des postes ecclésiastiques, il voulait savoir ce que Rome pensait.

Rome, en ce moment même, d’accord avec la Prusse, venait de nommer trois évêques, à Paderborn, Osnabrück et Breslau : à cet égard, la détente était sérieuse, mais à cet égard seulement. Schloezer, définitivement installé là-bas, voyait Léon XIII ; et le Pape lui disait en substance : « Ayez des instructions pour traiter sur des bases solides, et je serai conciliant. » Bismarck expédiait le bureaucrate Hübler, chargé d’assister Schloezer comme il avait assisté Reuss ; mais les bases solides faisaient toujours défaut. En fait, il ne pouvait pas y avoir d’amélioration sérieuse ; il ne pouvait pas, surtout, y avoir de paix, tant que la Prusse et le Saint-Siège ne se seraient pas entendus au sujet de la collation des fonctions ecclésiastiques. La législation bismarckienne et la résistance du Pape rendaient impossible toute nomination de curé ; du jour où sur ce point le Pape aurait définitivement fait les concessions auxquelles, d’ores et déjà, il était disposé, les populations recouvreraient des curés, des pompes religieuses : aux yeux de beaucoup de catholiques le Culturkampf serait