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Des pluies torrentielles tombaient très fréquemment, et venaient accroître de façon marquée nos premières misères.

Des bruits alarmans et sinistres courent alors dans les camps ! D’après ces rumeurs, l’armée de Mac Mahon aurait été anéantie à Sedan. La France était entièrement ouverte à l’invasion de l’ennemi.

On ne savait comment ces nouvelles, que le grand quartier général disait non confirmées, avaient pu être mises en circulation ! D’aucuns assuraient que c’était l’ennemi qui nous les faisait parvenir pour nous démoraliser et nous énerver.

9 septembre. — À 7 heures du soir, par une pluie diluvienne et un ouragan très violent, une forte canonnade commence sur toute la ligne ennemie ; elle est dirigée contre nos positions et nos cantonnemens.

Les Allemands ont leur artillerie déployée sur la rive gauche de la Moselle, c’est-à-dire vers Ars-sur-Moselle, à Vaux, Jussy, le Point-du-Jour, etc. Nos forts de Saint-Quentin et de Plappeville répondent à cette canonnade. Nous n’éprouvons pas de pertes, grâce aux dispositions de préservation adoptées ; toutefois, comme c’est peut-être là le prélude d’une attaque générale préparée contre nous, tout le monde se rend à son poste de combat.

Le bruit a été accrédité, à propos de cette canonnade, terminée vers 8 heures et demie du soir, que les troupes prisonnières de l’armée de Sedan contournaient Metz à ce moment même ! Le découragement dont elles étaient sans doute déjà envahies ne devait-il pas être augmenté par cette démonstration de l’artillerie allemande ?

10 septembre. — À partir du 10 septembre, la ration des chevaux est sensiblement réduite. Le temps continue à être épouvantable. Dans la soirée du 10, a lieu, à nos avant-postes de Moulins-les-Metz, une échange de 600 prisonniers.

Nous apprenons par les nôtres, qui nous sont rendus et proviennent de l’armée de Sedan, combien le désastre y a été complet et malheureux pour notre cause. Désormais, notre général en chef devait être certain de ne plus pouvoir compter sur des renforts venant par le Nord de Metz.

Il aurait pu, croit-on, avant notre affaiblissement définitif, tenter une trouée par le Sud, se jeter sur Château-Salins en coupant les chemins de fer à l’ennemi, et chercher ensuite à