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ce moment une phase également difficile à l’intérieur et à l’extérieur. Il en sortira. La mutinerie s’apaise. On a compté les officiers et les soldats déserteurs et on s’est aperçu qu’ils étaient peu nombreux. Beaucoup sont déjà rentrés dans l’ordre. Après l’anxiété du premier moment, l’espérance, la confiance même sont revenues. Mais les faits sont des faits et comment ne pas y voir un avertissement ?

Il n’est pas démontré, toutefois, que les difficultés avec lesquelles il est aux prises rendront le gouvernement jeune-turc plus conciliant à l’égard de l’Italie et on serait même tenté de dire : au contraire. Il faudrait un gouvernement très fort et qui se sentît tel pour prendre sur lui de traiter avec Rome. Le gouvernement actuel, s’il peut retrouver quelque popularité, ne la retrouvera que dans la résistance. S’il fallait émettre des probabilités, nous le ferions dans le sens de la continuation de la guerre. Mais nous ne savons pas ce qui s’est dit à Port-Baltique ni, par conséquent, ce qui peut en résulter. Quoi qu’il en soit, cette guerre est décevante pour les belligérans et pénible, dangereuse pour tout le monde : on ne peut que souhaiter d’en voir la fin.


La Convention démocrate de Baltimore a choisi pour candidat à la Présidence de la République M. Woodrow Wilson : il ne lui a pas fallu pour cela moins de quarante-huit tours de scrutin au cours desquels les chances ont été tour à tour pour M. Champ-Clarke d’abord, puis pour M. Wilson, puis de nouveau pour M. Clarke, puis finalement pour M. Wilson. Il semble que le fléau de la balance ait été entre les mains de M. Bryan qui, désespérant d’être élu lui-même, a tenu du moins à montrer sa puissance en favorisant tantôt un candidat, tantôt l’autre, et sans doute en imposant ses conditions avant de donner son indispensable concours.

La Convention a montré d’ailleurs de l’esprit politique en votant pour M. Wilson qui était un candidat plus avancé que M. Clarke. Elle avait d’abord élu pour la présider M. Parker contre le candidat de M. Bryan. Peut-être a-t-elle voulu seulement par là éliminer ce dernier et lui faire comprendre que, s’il pouvait encore jouer un rôle important au second plan, il devait renoncer au premier. Toutefois, quand M. Parker a été porté à la présidence de la Convention, nous avons dit que rien ne pouvait mieux faire les affaires de M. Roosevelt qui, après avoir coupé en deux le parti républicain, espérait sans doute voir se couper en deux le parti démocrate : avec les deux moitiés de chaque parti, on en aurait fait un troisième sur lequel M. Roosevelt et M. Bryan se seraient sans doute disputé l’influence définitive : mais il y avait des