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La maison a extérieurement la forme d’un grand rectangle de 45 mètres sur 30. Huit chambres de mêmes dimensions disposées sur les quatre côtés du rectangle entourent une cour intérieure. Toutes ces chambres reçoivent le jour par une porte donnant sur la cour. La maison n’a aucune fenêtre sur l’extérieur.

Ben Tahar occupe avec Maïmouna la première chambre à gauche en entrant ; le ménage de Mohammed vit dans la pièce voisine, Yamina avec les enfans occupe la troisième chambre, les vieilles domestiques les quatrième et cinquième chambres, les grands fils et les domestiques la sixième. Les septième et huitième chambres sont réservées aux hôtes de passage.

Le bétail est le soir abrité dans la cour.

Comme mobilier, nous trouvons des tapis, des nattes et des coussins, pas de draps de lit, pas de linge de corps. Des malles, remplaçant nos commodes et nos armoires, contiennent les bijoux, les souvenirs de famille. L’argent est enterré dans une cachette que connaissent seuls le maître de maison et son fils aîné.

Les femmes ne sont pas voilées ; elles jouissent d’une certaine liberté apparente, vont au marché, mais on leur interdit toute visite dans la ville espagnole où les hommes sont souvent appelés pour leurs affaires. Toute leur existence se passe donc dans le paysage désolé, sans ombrages, que nous trouvons autour d’Asanen, et elles ne savent du monde que ce qu’on peut en apprendre en allant de loin en loin au marché de Sok-el-Had. La famille ben Tahar tire ses revenus du jardinage, de la culture, de l’élevage du bétail, des ruches, de la pêche et du métier de maquignon auquel s’adonne de temps en temps le chef de famille.

Ben Tahar possède un champ de dix hectares qui, cultivé par des procédés sommaires, donne un revenu annuel de 1 500 à 2 200 francs. Le troupeau se composait le jour de ma visite de 40 moutons, 25 chèvres, 3 vaches, 2 veaux et produisait 300 à 400 francs de bénéfice annuel. Il faut ajouter pour mémoire quelques poulets étiques, le jardin et la pêche. J’évalue les dépenses de cette famille de 25 personnes à 2 200 francs par an, les recettes varient entre 3 000 et 4 000 francs. Ces Rifains sont donc très à leur aise, étant donné leur extrême sobriété et la simplicité de leurs goûts. Ils pourraient