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L’histoire de cette longue lutte entre deux tendances d’esprit opposées, également sincères et désintéressées, mettant en contradiction le plus souvent des caractères d’une élévation toute pareille, est instructive au plus haut point. Il faut souhaiter que notre pays profite de la lumière qu’elle jette sur quelques-unes de ses institutions. Elle éclaire en tout cas profondément la question de la poudre B, et permet d’envisager les solutions nécessaires à la sécurité de la marine.

Elle se résume dans la conséquence des situations respectives faites par la loi aux différens corps techniques destinés à collaborera une même œuvre de préparation militaire.

Les précautions prescrites par la marine ont été radicalement insuffisantes, parce que la stabilité de la poudre B n’est pas susceptible d’être réduite en formules générales, que celles-ci soient fondées sur sa durée, sur les températures subies par elle ou sur des épreuves de stabilité fractionnaires. La pratique a fait voir qu’entre des fragmens d’un même âge et parfois à l’intérieur d’une même gargousse, il pouvait exister des différences considérables dans l’état de conservation : ce dernier n’est donc pas une question d’âge. Les observations recueillies par l’Artillerie de terre ont aussi montré l’absence de toute différence appréciable entre des poudres ayant subi en magasin pendant des temps prolongés des conditions de température très différentes : ce n’est donc pas une question de température. Quant aux épreuves de stabilité, l’auteur même de la méthode, M. Vieille, ne les a jamais données que comme un procédé pour se renseigner très grossièrement sur la durée probable des poudres, surtout utile pour classer entre eux les produits de la fabrication, et dans le cas seulement où ils sont de même nature. Il a toujours reconnu que la loi de corrélation entre 110, 75 et 40 degrés n’était qu’approximative et qu’on n’en pouvait tirer aucune conclusion trop précise. En fait, l’épreuve pratiquée sur le même lot et parfois sur diverses parties du même brin par les mêmes expérimentateurs, peut donner des résultats variant de cinquante à cent cinquante heures ; et entre les mains d’expérimentateurs différens, les divergences sont encore plus considérables. C’est ainsi, par exemple, que le contenu d’une soute, appartenant à un même lot, débarqué d’un bateau après avoir donné douze heures aux officiers d’artillerie navale au port de débarquement, et immédiatement expédié à