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distinctes ; elles sont au nombre de cinq, toutes aux mains de l’Etat, en vertu du monopole, comme d’ailleurs les fabriques de coton-poudre. L’une se trouve à Sevran-Livry, près Paris, les autres au Ripault, près Tours, à Saint-Médard-en-Jalles, près Bordeaux, au Pont-de-Buis (Finistère), enfin au Bouchet (Seine-et-Oise), celle-ci dirigée par l’Artillerie. Le coton-poudre humide est une pâte solidifiée. Sec, il a l’aspect d’une poudre blanche, sorte de farine. Dans les deux cas il constituerait un explosif extrêmement brisant, celui même qui est employé dans l’intérieur de nos torpilles. L’invention de M. Vieille a consisté à l’enrober dans un agglutinant, qui est le collodion. Ce collodion se forme dans la masse même du coton-poudre par l’action d’un dissolvant, mélange d’alcool et d’éther. Le coton-poudre, en effet, n’est pas un corps chimiquement homogène : c’est probablement une juxtaposition intime de colons diversement nitrés, de trinitro-celluloses et de binitro-celluloses. Ces dernières se dissolvent dans le mélange alcool-éther pour donner le collodion, matière gélatineuse qui emprisonne la trinitro-cellulose. Le tout forme une pâte qu’on dessèche, qu’on lave et qu’on comprime au travers de filières la débitant en rubans. De la farine primitive on a fait une nouille ou un macaroni. La fabrication de la poudre B est calquée, dans ses procédés mécaniques, sur l’industrie des pâtes alimentaires.

En France, on aboutit seulement à des lamelles, plus ou moins minces suivant le calibre de l’arme où elles doivent être employées. Les plus épaisses, destinées au canon de 305 millimètres, ont jusqu’à un demi-centimètre d’épaisseur. Ces lames, qui ressemblent à de la colle à bouche, sont réunies en fagots réguliers qui constituent les élémens des charges ou gargousses.

Les poudres ainsi formées évoluent, tout comme le coton-poudre qui les compose. A l’intérieur de ces lames compactes, les gaz produits par sa combustion lente se meuvent difficilement et risquent d’accumuler sur un point les actions dangereuses. Mais le dissolvant qui a servi à gélatiniser le colon-poudre se trouve utile ici pour produire une neutralisation supplémentaire. Car il est impossible de purger, en cours de fabrication, la poudre de tout ce qui s’y était incorporé de ce dissolvant en excès. Au début, on y vit un inconvénient auquel il fallait se résigner ; on ne tarda pas à s’apercevoir que c’était au contraire un avantage parce que ce résidu, en terme technique le