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Nous voudrions être sûr du moins qu’au moment de la rentrée des Chambres les préoccupations qui ont rempli ses vacances seront dissipées et que le lirmament international sera rasséréné. Cette dernière expression est peut-être excessive ; nous ne devons pas être trop exigeans ; les négociations que nous avons poursuivies avec l’Allemagne ne sont pas de nature à nous donner une satisfaction sans mélange, puisque, à côté des avantages qu’on nous a difficilement consentis, il y a les sacrifices auxquels nous avons dû consentir nous-mêmes et qui ne laissent pas d’être pénibles. Néanmoins, si ces négociations, après avoir été plusieurs fois sur le point de se rompre, ont enfin abouti, il faudra s’en féliciter. Nous l’avons fait déjà dans un post-scriptutn ajouté à notre dernière chronique, au moment où est arrivée la nouvelle que le premier arrangement était conclu et que MM. de Kiderlen et Jules Cambon en avaient parafé le texte. Restait l’arrangement sur le Congo : il n’est pas encore fait, mais on assure qu’il est sur le point de l’être. Que sont ces deux arrangemens qui se complètent l’un par l’autre ? Nous ne le savons pas encore ; les renseignemens donnés par les journaux sont incomplets et l’exactitude en est contestée par des notes officieuses. Il semble bien cependant que l’Allemagne ait tenu quelque compte de nos observations et qu’elle ait réduit ses prétentions premières, et, s’il en est ainsi, nous le devrons à la fermeté et à l’habileté de nos négociateurs.

On a reproché à notre ambassadeur à Berlin, et nous retrouvons encore quelquefois ce reproche dans les journaux, d’avoir interverti l’ordre naturel des choses en parlant des concessions que nous ferions au Congo avant de parler de celles qu’on nous ferait au Maroc : on a même ajouté qu’il avait trop promis, ou trop laissé espérer. Si ce reproche est juste, il se trompe certainement d’adresse, car M. Jules Cambon a certainement suivi les instructions qui lui avaient été données. Un ambassadeur n’est pas responsable de la politique qu’il sert, il ne l’est que de son exécution. Mais, à qui qu’on l’applique, le reproche ne nous paraît nullement fondé, au moins dans sa première partie, et nous avons eu déjà l’occasion de le dire. Si l’Allemagne savait d’avance, à peu de chose près, ce que nous lui demanderions au Maroc, elle ignorait complètement ce que nous serions disposés à lui céder en échange, et il faut n’avoir jamais fait de la diplomatie qu’en chambre pour croire qu’elle nous aurait concédé quoi que ce soit au Maroc avant d’avoir quelque aperçu de ce que nous lui donnerions ailleurs. Au surplus,