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« Voici, écrit-il, quelques lignes qui mettront bien en relief l’étrange symbolisme légendaire sous lequel nous nous voyons trop souvent submergés après toute une vie de patient labeur. Pour exprimer en peu de mots mes sentimens sur les échos venus jusqu’à moi de Sesenheim, je me servirai d’une comparaison tirée de la physique en général, et de l’Entoptique en particulier. (On sait que le poète s’occupa toute sa vie avec prédilection de la théorie optique des couleurs.) J’utiliserai pour me faire comprendre les réflexions réitérées d’un même rayon lumineux.

1. — Le reflet d’une jeune et bienheureuse vie de rêves délicieux s’imprime avec énergie dans l’Inconscient du jeune homme. (C’est ici une allusion aux souvenirs laissée par l’idylle alsacienne dans l’âme du poète.)

2. — L’image ainsi conservée par lui est rappelée de temps à autre dans sa mémoire et flotte ça et là pendant des années dans son for intérieur, toujours parée de charme et de tendresse.

3. — Ce trésor charmant du bonheur jadis obtenu, après avoir été longtemps renfermé de la sorte, se voit enfin exprimer vers le dehors sous la poussée d’un vivant souvenir, et par le fait de la rédaction écrite, subit comme une nouvelle réflexion lumineuse après celle de la simple mémoire. (Allusion à la rédaction de Poésie et Vérité et sans doute justification des licences que s’est octroyées le narrateur.)

4. — Ce reflet nouveau rayonne désormais de tous côtés par le monde et dès lors une belle sensibilité (celle de Naeke par exemple) pourra se réjouir à cette apparence comme si elle était réalité, de manière à en recevoir une profonde empreinte à son tour.

5. — Par là se développe en cette âme nouvelle une tendance à faire revivre pour son plaisir dans la réalité tout ce qui peut encore être sauvé de ce passé.

6. — Ce désir grandit et, pour le satisfaire, il devient indispensable de se transporter sur place, afin de goûter du moins par la vue le décor de l’image radieuse (c’est le voyage de Naeke).

7. — Là se produit cette heureuse circonstance que l’on retrouve au lieu vénéré un homme sympathique et bien instruit ( ! ) en qui l’image s’est également imprimée. (Cette périphrase bienveillante désigne évidemment le trop bavard Schweppenhauser ! )

8. — De là naît, dans ce décor, qui jusque-là semblait vide