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Arabindo Ghose aurait sans doute acquis, avec le temps, l’autorité suffisante pour remplacer Tilak. « Élevé en Angleterre, et si complètement qu’il éprouvait des difficultés à s’exprimer en bengali quand il revint dans l’Inde, il n’est pas seulement un Hindou de haute caste, mais aussi un de ces mystiques qui croient que les pratiques les plus extrêmes de l’ascétisme peuvent transformer un homme en surhomme. Il s’est proclamé lui-même le grand prêtre d’une renaissance religieuse qui a pris une profonde influence sur l’imagination de l’impressionnable jeunesse du Bengale. Son évangile éthique n’est pas dénué de grandeur… Pour lui, la domination britannique, et la civilisation occidentale qu’elle représente, menacent l’existence de l’hindouisme ; donc elles doivent prendre fin, et, pour obtenir ce résultat, tout Hindou doit se lever et agir. » Mais, déjà condamné en 1907 pour ses articles incendiaires, accusé en 1910 pour sa collaboration révolutionnaire au Karmayogin, il fut obligé de se réfugier à Pondichéry pour éviter une nouvelle arrestation. En novembre 1910, il écrivit aux journaux de Madras pour leur annoncer son éloignement des luttes politiques pendant un temps indéterminé.

Privée de ses chefs les plus habiles et les plus influens, contenue par les lois restrictives sur la Presse, sur les Sociétés secrètes, sur les réunions publiques, sur le commerce d’armes, sur la justice expéditive, sur la police, promulguées par lord Minto et que les nouveaux Conseils ont approuvées, il semble que l’agitation anti-anglaise va disperser ses efforts dans une série de complots sans liaison et sans résultats. En comparant la situation politique dans l’Inde au commencement de 1911 avec ce qu’elle était dans la période comprise entre 1907 et 1910, les optimistes déclarent avec lord Montaigu, le nouveau sous-secrétaire d’Etat pour l’Inde, que l’apaisement a fait de sérieux progrès.

Cependant, la liste des attentats individuels et des conspirations collectives depuis l’application de l’Indian Councils Act est encore assez longue pour inspirer quelque inquiétude aux fonctionnaires et colons anglo-indiens, et pour montrer que les fanatiques du Swaraj n’ont pas perdu toute espérance. Le 13 novembre 1909, deux bombes étaient jetées sur la voiture de lord Minto pendant son entrée solennelle dans Ahmedabod ; par un hasard extraordinaire, le vice-roi ne fut pas atteint et l’auteur