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des Indiens dans les colonies anglaises et notamment dans l’Afrique du Sud a été le sujet de débats passionnans et de propositions raisonnables. Les projets d’amendement à la loi électorale, l’extension des mesures de répression, les modifications dans le régime de l’émigration, la discussion des budgets, les vœux sur la Protection et le Libre-Echange, sur l’instruction, sur les Travaux publics ont montré que les conseillers indigènes s’intéressent aux questions économiques plutôt qu’aux spéculations de politique pure.

Les Anglais auraient tort de s’en réjouir. Les discussions économiques conduisent directement aux malentendus politiques, et la révolte ouverte est le dernier argument des intérêts lésés. L’Angleterre est libre-échangiste, mais l’Inde est protectionniste : ses représentans « avancés » au Conseil impérial accusent volontiers le gouvernement d’avoir détruit les industries indigènes pour la satisfaction égoïste des usiniers métropolitains. Le swadeshisme a désormais, dans les Assemblées législatives, des avocats puissans, dont les revendications seront plus efficaces que l’agitation de la rue et des bazars. Ils peuvent, en obtenant l’adhésion des membres modérés ou conservateurs qui sont les délégués des Chambres de commerce et des propriétaires fonciers, acquérir la majorité dans les Conseils ; l’évolution inévitable vers le self-government aurait alors pour conséquence une guerre de tarifs, entre la métropole et sa grande colonie, prélude peut-être fatal de conflits plus sanglans.

Quoi qu’il en soit, la sympathie et l’intérêt qui ont accueilli les nouveaux Conseils font prévoir que le Congrès national disparaîtra bientôt dans l’indifférence et l’oubli. Organisé en 1885 par M. Hume, il n’était à l’origine qu’une réunion d’Indiens éclairés, instruits à l’européenne, qui discutaient pendant trois jours, à la fin de chaque année, les problèmes politiques, économiques et sociaux de l’Empire. Les congressistes étaient les élus de collèges électoraux fondés par les initiatives privées, et dont faisaient partie tous ceux qui se croyaient obligés par leur science et leur intégrité à se dévouer au bien public. Tant que l’influence du vieux docteur Naoroji fut prépondérante, le Congrès eut des ambitions modestes : il se considérait comme le conseiller bénévole de l’autorité, émettait des vœux, publiait des rapports qui donnaient parfois d’utiles indications au