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moins, ne la voulaient pas avant de vouloir être ministres ; mais ils se seront, eux aussi, « adaptés ; » et du reste M. Briand, ne l’oublions pas, est, dans ce second Cabinet, un peu omni-ministre.)

« Le projet de loi est tel enfin qu’il s’imposait à un gouvernement qui, en face d’une Chambre nouvelle, hésite, tâtonne, cherche sa majorité et ne sait pas encore très exactement où elle est. C’est là qu’il est sage de ne pas montrer une intransigeance de théoricien ; c’est là qu’il est bon pour le gouvernement de promener ses antennes. »

Suivait, par le menu, dans ces notes, la critique de l’exposé des motifs, où ce serait un jeu de relever autant d’erreurs de doctrine qu’on a relevé d’erreurs historiques dans un autre document du même genre, — je ne dis pas du même auteur ; — puis je reprenais, pour conclure :

« Eh bien ! ce n’est pas suffisant. Ce n’est pas l’attitude que doit prendre un gouvernement dans une pareille question, en face d’un pareil problème. Qu’il ne soit pas intransigeant sur les détails et les modalités, à merveille, et l’on serait tenté de l’en féliciter, si d’ailleurs il pouvait faire autrement. Mais il ne faut pas qu’il ait l’air de se désintéresser, ni que l’absence d’intransigeance prenne la mine d’une absence de préférence ou même d’une absence de volonté. Quand on a dit du mode de scrutin existant ce que le président du Conseil en a dit, on ne peut pas y rester, il faut en sortir. On ne peut pas laisser le suffrage universel s’enlizer dans le marécage qu’on lui a montré. On ne peut pas se borner à faire, de la berge, un geste mort de poteau indicateur qui marque la profondeur et n’aide pas à remonter. L’âpreté même de son langage crée au président du Conseil un devoir envers la nation, à laquelle il lui est défendu de dire : « Tu es dans la mare stagnante ; tire-t’en comme tu le pourras ! »

A le considérer en son texte, le projet de loi partait de cette donnée, et se ramenait à cette caractéristique : c’était un projet, non de représentation proportionnelle tout court, ce qui, bien que court, est clair et complet, mais, comme il en usurpait le titre par un étrange abus des mots, de « représentation proportionnelle des minorités. » Non pas même ou non pas seulement un projet de représentation plus ou moins proportionnelle, avec prime à la majorité ; mais plutôt de représentation majoritaire, avec part aux minorités. C’était, au pied de la lettre, un