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permis de croire que si la Commission plénière, confirmant l’opinion de la sous-commission, se prononce pour le système des signes extérieurs, le ministre cédera. En tout cas, il n’a pas pris une attitude définitive sur ce point, comme sur les cinq autres que nous avons énumérés plus haut, et cela est très important.

A l’exception de ce point particulier où sa pensée est restée flottante, M. le ministre des Finances est demeuré fidèle au projet de loi qu’il avait élaboré il y a quelques années avec M. Jaurès et rien, dans son attitude, ne peut faire regretter à ce dernier d’avoir donné sa confiance au gouvernement. M. Jaurès brûlait d’ailleurs de la lui donner. Voilà si longtemps qu’il n’était plus ministériel ! Il aspirait à le redevenir. M. Denys Cochin l’ayant pris l’autre jour à partie à propos du Maroc, s’arrêta tout à coup en disant qu’il ne voulait pas l’interpeller. — C’est un plaisir que je ne veux pas déflorer, répondit M. Jaurès et que je garde pour mes vieux jours. — Il n’y a là qu’une boutade à laquelle nous n’attachons, bien entendu, aucune importance. Qui sait cependant ? Si M. Jaurès ne se rapproche pas encore du pouvoir, il se rapproche singulièrement de ceux qui l’exercent. Nous ne savons pas ce qu’en pensera décidément la Chambre quand l’évolution sera complète, mais il est facile de prévoir ce qu’en pensera le pays. Le pays n’est pas avec M. Jaurès, il était et il reste avec M. Briand : nous prenons ici le nom des hommes pour désigner des politiques. La question est de savoir, de ces deux politiques, quelle est celle que M. Monis adoptera définitivement. Sa déclaration promettait la première ; ses actes sont conformes à la seconde ; il est encore trop tôt pour juger.


Le débat sur le Maroc auquel nous venons de faire allusion a eu lieu au sujet d’interpellations que M. Denys Cochin et plusieurs de ses collègues ont adressées au ministère dont ils voulaient connaître la politique. Les notes des journaux, même lorsqu’elles ont des allures officieuses, n’engagent pas les gouvernemens : cependant on y cherche et on y trouve quelquefois des indications sur leurs tendances : aussi en avait-on remarqué dans lesquelles le ministère actuel était présenté comme résolu à continuer au Maroc la politique de son prédécesseur. L’ancien Cabinet, on le sait, n’avait pas approuvé une entreprise militaire du général Moynier, entreprise qui n’était pas conforme à ses instructions et n’avait d’ailleurs pas été heureuse : aussi avait-il jugé inutile d’envoyer des renforts à cet officier. On savait que M. Denys Cochin, dans sa patriotique ardeur,