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et obligatoire, pour la Banque, d’accorder les avances nécessaires. Toutefois, même à ce moment, il ne saurait être question d’ouvrir, sans conditions, un crédit illimité. Quelque grande que soit la puissance de l’établissement, elle a des bornes ; si elles venaient a été dépassées, l’État serait la première victime, puisque le papier qui aurait été émis pour lui fournir des ressources perdrait une partie de sa valeur et ne représenterait qu’une fraction de plus en plus faible de la somme pour laquelle le gouvernement l’aurait accepté et dont il se serait reconnu débiteur. Il n’est pas à notre connaissance qu’aucun membre du Parlement anglais, au cours de la guerre du Transvaal, ait proposé de couvrir la plus petite partie des énormes dépenses qu’elle a imposées au Royaume-Uni, par un emprunt à la Banque d’Angleterre. Au plus fort de la campagne contre le Japon, le Trésor impérial russe est resté créancier de la Banque d’État. C’est une vérité qui se répand de plus en plus, que l’abus des émissions ne fait que nuire aux pays qui les autorisent. En tout cas, s’il est parfois nécessaire d’avoir recours au papier-monnaie, ce ne doit être qu’à la dernière extrémité et en s’efforçant d’en contenir rémission dans les limites les plus étroites ; et n’oublions pas que les billets émis par une banques d’émission, en représentation d’une créance sur le Trésor public, ne sont pas autre chose que du papier-monnaie.


V

La Banque de France est aujourd’hui, après la Banque d’Angleterre et la Banque de Suède, le doyen des grands instituts d’émission de l’Europe : la Banque néerlandaise a été fondée en 1814 ; la Banque austro-hongroise, qui d’ailleurs a subi, depuis son origine, des transformations profondes, date de 1816 ; la Banque de Portugal, de 1846 ; la Banque de Belgique, de 1850 ; la Banque d’Espagne, de 1856 ; la Banque de Russie de 1860 ; la Banque de l’Empire allemand, de 1875 ; la Banque d’Italie, de 1893. Mais ce n’est pas seulement à son ancienneté que la Banque de France doit la situation exceptionnelle dont elle jouit et la considération dont elle est entourée dans le monde entier ; ce n’est pas non plus uniquement à la perfection de ses services, dont nous avons montré le développement, et au fait que tous, petits commerçans et grands industriels, simples particuliers et