Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 2.djvu/538

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
532
REVUE DES DEUX MONDES.

aux deux autres, avec ses professeurs, tous docteurs, seuls faisant de l’enseignement supérieur, seuls faisant passer les thèses de doctorat, etc. L’étudiant pourrait passer dans cet enseignement tout de suite après sa licence, se destinant, dès sa licence passée, à l’enseignement supérieur et ne voulant point être professeur de lycée. Je trouverais cela déplorable, mais j’admettrais qu’il fût permis. Le vrai professeur d’enseignement supérieur sera toujours pour moi celui qui aura poussé jusqu’à l’agrégation, qui se sera initié ensuite à l’enseignement supérieur et qui aura enseigné quelques années dans les lycées. Il est bon, ici, de connaître la rivière dont on doit être la source. Cependant, j’admettrais que certains jeunes spécialistes, à leurs risques et périls, du reste, passassent d’une instruction secondaire incomplète à l’enseignement supérieur de leur choix ou de leur vocation. Il faut de la liberté dans l’éducation à vingt ans, et il ne faut pas que les cadres soient trop rigides.

Inversement, le jeune agrégé pourrait quitter la Sorbonne sans aborder l’enseignement supérieur, exactement comme faisait l’élève de l’ancienne Ecole normale. Il aurait tort ; car sait-il ce qui l’attend ? Sait-il si, une fois dans son lycée de province, le goût de l’enseignement supérieur et l’idée de faire ses thèses ne lui viendront pas ? Et alors, ses thèses, comment les ferait-il de la manière dont on les doit faire à présent, s’il n’a pas été initié aux méthodes nouvelles ?

Dans mon plan, l’ordre et la marche sont ceci : un an de licence, deux ans d’agrégation, un an ou deux d’enseignement supérieur. Objection : cela fait cinq ans ! Je trouve que ce n’est pas trop et que c’est précisément ce qu’il faut. Si les exigences de la vie s’y opposent, je proposerais que l’agrégé qui est forcé d’aller gagner sa vie dans les lycées pût prendre, dans les six premières années de son service, deux ans de congé, en une fois ou en deux fois, pour revenir en Sorbonne apprendre comment on travaille en enseignement supérieur. Remarquez que ce ne serait pas toujours nécessaire et que le jeune agrégé placé auprès d’une faculté de province trouverait dans cette faculté gens qui lui enseigneraient très bien le métier d’enseignement supérieur.

Voilà, ce me semble, ce qu’il y aurait à faire. Je n’ai pas besoin de dire que tout cela ne serait que pour un temps et assez court. Ce qui périt et ce que la démocratie veut qui périsse, j’ai dit pourquoi, c’est l’enseignement secondaire. Ce qui sera, dans