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moins. Nous n’attendions même pas de lui qu’il irait jusqu’à ménager les préjugés, quoique ce soit d’une saine politique ; mais les traditions, les habitudes et les intérêts légitimes sont choses infiniment respectables et, certes, M. Caillaux n’en avait pas tenu un compte suffisant dans son premier projet. Il peut dire, à la vérité, que ce projet a encore été aggravé par la dernière Chambre, et nous n’y contredirons pas ; mais, tel qu’il était à l’origine, il était déjà fort mauvais et un de ses plus grands torts était d’ouvrir la porte aux surenchères qu’on y a introduites. Le gouvernement, au total, ne s’engage pas à grand’chose puisque la fin de sa phrase se retourne contre le commencement, mais la fin était obligatoire et le commencement ne l’était pas : c’est donc le commencement qui importe. Et sur la question des cheminots ? Ici encore nous laissons la parole au ministère. « Dans l’ordre social qui nous préoccupe, à la stricte justice qui est une dette, il convient, dit-il, d’ajouter la bonté : la justice et la bonté sont de puissans facteurs de l’ordre et de la régularité des services. L’administration des chemins de fer de l’État, qu’il faut laisser libre pour la faire responsable, a spontanément réintégré la majeure partie des employés révoqués pour fait de grève. Elle continuera, en pleine liberté, la révision prudente des peines d’exclusion par l’examen attentif des dossiers, avec la ferme résolution de ne reprendre aucun de ceux qui ont été frappés par la justice pour violences ou faits délictueux, où des agissemens coupables ou nettement anarchistes mettraient en péril la sécurité publique. Nous comptons que cette pratique bienveillante et prudente nous donnera de tels résultats qu’elle nous rendra plus forts pour en demander l’adoption aux Compagnies de chemins de fer. » Tout cela, assurément, est assez contourné ; la justice, la bonté se balancent ; l’intérêt public, la pitié pour les révoqués se font équilibre ; la Compagnie de l’État ne réintégrera que ceux de ses agens qui n’ont été condamnés pour aucun délit, ce qui simplifiera beaucoup sa besogne ; elle fera tout cela librement, ce qui donne à espérer que la liberté des Compagnies privées ne sera pas moins respectée. Comment agira-t-on sur ces dernières ? Par la persuasion, par l’exemple, par les résultats sur lesquels on compte. Attendons les résultats, cela donne du temps. Le plus désirable de tous est la suppression des accidens qui, sur le réseau de l’État, se multiplient plus qu’ailleurs, évidemment parce que la discipline y est plus relâchée. Si M. Caillaux a rédigé le passage de la déclaration qui se rapporte à l’impôt sur le revenu, celui qui traite des cheminots n’est sûrement pas l’œuvre de M. Berteaux. Sur les questions scolaires, la déclaration a