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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Lorsque a paru notre dernière chronique, nous n’avions plus déjà de ministère, mais l’événement venait de se produire et nous n’avons pas eu le temps de l’annoncer : nous avons un ministère aujourd’hui, mais il est trop tôt pour émettre sur lui un jugement définitif. Eh quoi ! dira-t-on, sa composition ne vous apporte-t-elle pas des lumières suffisantes ? N’avez-vous pas la déclaration qu’il a lue aux Chambres ? Le nouveau président du Conseil n’a-t-il pas déjà prononcé un discours, et la Chambre n’a-t-elle pas voté un ordre du jour en sa faveur ? En effet, toutes ces manifestations ont eu lieu, mais comme elles sont en contradiction les unes avec les autres, que le nom des nouveaux ministres a un sens et que leur déclaration en a un autre, enfin que leur attitude générale ne témoigne jusqu’ici que d’un extrême embarras, il est prudent d’attendre avant de se prononcer. Déjà les premiers actes du ministère, ou du moins ses premières paroles ont causé de vives déceptions aux uns, sans avoir donné de grandes espérances aux autres. La situation reste très confuse, et rien, en somme, n’est plus naturel, car le ministère est né d’une intrigue, et il s’est constitué en dehors de toutes les règles parlementaires.

Quelques explications rétrospectives sont ici nécessaires. Le ministère est tombé, ou plutôt s’est démis, à propos d’une interpellation sur la politique religieuse, à la suite de laquelle il n’a eu finalement qu’une majorité de 16 voix. Le fait s’est produit avec une telle rapidité qu’il a donné l’impression d’un événement imprévu. Cependant il ne l’était pas tout à fait : depuis quelques semaines, on sentait que le ministère de M. Briand était fatigué et un peu usé. Cette impression date du jour où il s’était maladroitement reconstitué. Nous avons dit alors notre surprise ; elle a été d’ailleurs générale. On était au