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Les églises que construisent les architectes de la Contre-Réforme sont comme l’aboutissant de toutes ces recherches. Le Gesu de Vignole correspondait si bien à tout ce qu’on pouvait désirer pour une église qu’il n’a cessé de servir de modèle jusqu’à nos jours. Il se compose d’une seule nef, le long de laquelle, en place de nefs latérales, se succèdent des chapelles, qui, en communiquant entre elles, offrent les mêmes facilités de circulation que les collatéraux des églises françaises ; elles permettent aussi la disposition de tribunes au premier étage, d’où les religieux de la communauté peuvent assister aux offices sans se mêler au public. Pour qu’il n’y ait aucune place perdue, l’autel, au lieu d’être à la croisée du transept, est adossé au fond même de l’abside ; et cette abside ainsi que les transepts n’ont qu’une faible profondeur, de telle sorte que l’autel et la chaire, que l’on adosse à l’un des piliers de la nef, sont aisément vus de toutes les parties de l’église. Ajoutons enfin que le peu de profondeur des transepts qui ne dépassent pas les chapelles latérales permet une construction très facile et très économique ; toute l’église, comme les primitives basiliques, s’inscrit dans un rectangle que seule dépasse légèrement la saillie du chœur.

Telle fut l’œuvre de Vignole qui, sous des formes classiques, fut inspirée des plus anciennes traditions du Moyen âge. Au fond, nous y trouvons dans ses élémens essentiels le style que nous désignons sous le nom d’art roman. C’est une église voûtée en berceau continu, avec cette particularité que la voûte a une moins grande hauteur que dans les églises romanes du moyen âge et qu’ainsi il est plus facile de la soutenir et de lui donner de plus larges dimensions.

Dans une œuvre ainsi faite, l’apport classique, si l’on y réfléchit bien, se réduit à fort peu de chose : à des pilastres et à un entablement plaqués contre les murs. C’est tout, et cela, à vrai dire, n’est qu’un décor, une inutilité constructive. En conservant les ordres antiques, les maîtres de cet âge croyaient être des constructeurs qui faisaient revivre les règles architecturales de l’antiquité grecque ; ils ne l’étaient pas. Comme tous les maîtres de la Renaissance, ils connaissaient mal l’architecture grecque et ils ne faisaient que suivre les Romains qui, les premiers, leur avaient donné l’exemple de l’utilisation des ordres grecs comme placage et non comme élémens constructifs.

Et l’on peut penser que ce fut là, non la faiblesse de l’art