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LA MORT
DE
GUY DE MAUPASSANT[1]

Juillet 1891. — Nous voici à Divonne-les-Bains. Mon maître désire être un peu éloigné du centre du bourg ; aussi c’est dans la campagne, chez la veuve d’un médecin, dans une sorte de ferme, que nous prenons un pied-à-terre. Les jours suivans, je partis faire les provisions au village, et je revins par des sentiers qui traversaient des champs d’avoines et de blés dorés ; ils étaient séparés par endroits de grandes parties de trèfle vert, sur lequel semblait étendu un léger tapis incarnat au fond violet très doux. Sur les bords de ce sentier, je trouve des trèfles à quatre, six et huit feuilles, toujours en nombre pair, ce qui porte chance, au dire des gens des champs…

M. de Maupassant, lui, va par la route prendre sa douche, deux fois par jour. Mais ce chemin lui paraît long par sa monotonie ; seuls, quelques rares noyers coupent un peu l’horizon et jettent une note pittoresque dans le ciel d’un bleu foncé. Il y a bien le Mont-Blanc là-bas, mais il est loin, puis on le laisse à gauche pour aller à Divonne.

  1. Ces pages sur les derniers mois de l’existence de Guy de Maupassant sont extraites des Souvenirs écrits par son fidèle valet de chambre, M. François Tassart, de 1883 à 1893. Le volume paraîtra prochainement à la librairie Plon.