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être livrée à la Pileuse, c’est-à-dire telle qu’on l’apporte sur le marché où son prix d’achat est de 90 centimes à 1 franc la livre. Ajoutons-y la main-d’œuvre de la Pileuse (suivant son habileté ou la grosseur du fil, elle demandera 50, 60 et 75 centimes), le prix moyen de 60, lequel ajouté au prix d’achat donne 1 fr. 60, en plus le blanchissage compté généralement à 0 fr. 15, soit un total de 1 fr. 75 par livre de fil. Il reste donc un écart de 25 centimes entre le revient des deux prix obtenus l’un par la mécanique et l’autre par les fuseaux.

Le blanchiment de ces fils se fait au moyen d’un lessif semblable à celui que l’on prépare pour le linge ordinaire, c’est-à-dire avec la cendre de bois que l’on fait bouillir et que l’on reverse ensuite successivement un certain nombre de fois sur le cuvier, au fur et à mesure que le liquide s’écoule et tombe dans le récipient placé au-dessous. S’agit-il du fil ? Le transvasement doit se renouveler douze fois, et il est important d’ajouter à cette décoction de cendrés une petite quantité de chaux. C’est le meilleur moyen de faire disparaître la couleur grise du produit.

L’opération, sans être compliquée, se fait néanmoins assez laborieusement et si certaines ménagères s’y astreignent encore, c’est moins pour l’aspect de leur toile et de l’emploi du fil filé à la main ou à la machine, que pour sa solidité, bien compromise par l’action d’un produit chimique.

Il s’agit maintenant de dévider le fil livré par la fileuse en écheveaux énormes et de le mettre en autant de pelotes que la toile à tisser devra contenir de fils dans sa trame, c’est-à-dire dans le sens de sa largeur. Or, un tissu de moyenne grosseur et de 1 mètre de large contient environ 1 800 fils. C’est donc en 1800 pelotes qu’il s’agit de répartir le nombre d’écheveaux existans. Le prix de ce travail est généralement compté 10 centimes par livre, ce qui donne un total de 1 fr. 80 de fil par mètre carré de toile.

Le fil, ainsi peloté, est placé dans des sacs et porté chez le tisserand, qui indique alors la quantité de graisse et de farine qu’il exige par mètre de tissu. L’usage veut, tout au moins dans le Puy-de-Dôme, que l’on nourrisse le tisserand le jour où il vient chercher le travail et le jour où il le rapporte. Le prix demandé étant de 75 centimes par mètre, le prix de revient de ce deuxième produit est de 2 fr. 55 ou 2 fr. 60 au lieu de 2 fr. 25