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qui aura trait à l’Asie tout entière. Les formations sociales. et politiques des peuples de l’Orient ne sont pas le produit immuable, le produit fatal de leur sol, de leur climat, des races dont ils sont issus ; ces formations, qui se sont d’ailleurs continuellement modifiées, sont, dans leur état actuel, le résultat du traditionalisme passif que ces peuples ont opposé aux retours de barbarie causés par les continuelles invasions des Nomades. Mais une ère nouvelle a commencé pour l’Asie ; ces formations disparaîtront brusquement, beaucoup même sans laisser de traces profondes, comme ont disparu les formations du Vieux Japon. A l’exemple du Japon moderne, tous les peuples orientaux les remplaceront par des institutions nouvelles, et ces institutions seront en partie l’aboutissement de la lente évolution que la civilisation asiatique a constamment suivie en dépit des formations traditionnelles jalousement conservées, en partie l’imitation directe des institutions européennes. Il ne faudrait pas croire cependant que les civilisations de l’Asie et de l’Europe soient destinées à se confondre. Certaines de nos institutions sont proprement européennes, d’autres sont vraiment humaines ; si l’Europe les a la première établies, c’est que sa civilisation avait devancé celle de l’Asie. Ce sont ces dernières institutions que l’Asie s’assimilera en les dépouillant avec le temps de ce qu’elles ont actuellement d’européen. Dans leurs grandes lignes, la civilisation de l’Asie et celles de l’Europe ont suivi des évolutions parallèles ; grâce aux communications de plus en plus faciles qu’amènent les progrès des sciences, elles tendront à se rapprocher ; mais longtemps encore, toujours peut-être, elles resteront distinctes.


LA MAZELIERE.