Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 1.djvu/563

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à la pairie par droit héréditaire, ne se préparent pas avec autant de sérieux qu’autrefois aux fonctions qu’ils doivent exercer un jour. On prétend qu’un trop grand nombre d’entre eux mène une vie dissipée, pratique l’absentéisme et viendra grossir un jour le troupeau des backwood peers ou même celui des black sheep.

Enfin ceux qui s’efforcent de porter, dans ce conflit, un jugement impartial ne sauraient méconnaître que, depuis que la scission des Unionistes a brisé les cadres de l’ancien parti Whig et réduit, dans la Chambre des Lords, le parti libéral à une minorité de 80 voix environ, la majorité conservatrice a un peu abusé de son droit de Veto, sans que les motifs dont elle s’est inspirée, dans l’usage qu’elle a fait de ce droit, aient toujours été tirés de l’intérêt véritable du pays. C’est ainsi, par exemple, que si la Chambre des Lords a laissé passer la loi sur les pensions de vieillesse, tout en prévoyant le poids très lourd dont cette loi pèserait sur les finances du pays, elle a rejeté presque sans discussion la loi sur la patente des débitans en partie sans doute parce que cette loi faisait peser des charges excessives sur toute une classe de citoyens dont la propriété est aussi respectable que celle des autres, mais en partie aussi parce qu’elle lésait les intérêts de certains grands brasseurs et distillateurs, membres influens du parti unioniste, ce qui lui a valu une incontestable popularité auprès des débitans, mais a mis contre elle tout le parti de la tempérance. On lui reproche aussi d’avoir usé de son droit de Veto avec quelque hauteur et d’avoir trop marqué qu’elle entendait tenir la Chambre populaire dans sa dépendance. Si, dans ce propos d’un candidat libéral : que l’Angleterre vivait sous la tyrannie de la Chambre des Lords, il y avait une exagération manifeste, cependant il est certain qu’elle a fait un peu trop sentir à la Chambre populaire qu’aux Lords reste le dernier mot, puisqu’ils ont toujours le droit de dire : non. Sur 237 Bills qui leur ont été envoyés par les Communes depuis cinq ans, ils en ont, il est vrai, adopté 232. Mais les cinq qu’ils ont rejetés étaient, disent les Libéraux, les plus importans.

La justesse de quelques-unes de ces critiques et la nécessité de réformer la Chambre Haute n’avait pas échappé à l’œil exercé d’un homme qui a toujours occupé en Angleterre une situation considérable, mais dont les événemens ont mis en lumière l’esprit politique et la clairvoyance : de lord Rosebery. Cet ancien