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aucun rapport avec celui qu’il tient pour un traître et pour un voleur. Mais la misère l’assiège ; les privations menacent la vie de sa femme et celle de son enfant ; pour les sauver, il doit demander pardon à son père, rentrer chez lui, su soumettre à la toute-puissance de son argent.

Pourquoi Pompeo Barbarò ne se présenterait-il pas à la députation ? Élection disputée, où l’on remue toute la boue de son passé ; où il voit surgir comme adversaire le frère de sa victime, Fnincesco Alamanni ! Mais la crise se dénoue à son profit ; le voilà député de Panigale, et noble par surcroît.

Pourquoi Pompeo Barbarò di Panigale n’épouserait-il pas une de ces femmes aux mains blanches, qui lui faisaient envie, quand il ouvrait la porte aux voitures, concierge chez les Alamanni ? Après les honneurs, l’amour. La marquise de Collalto l’a repoussé une première fois, au moment où il s’offrait à elle comme le seul salut possible, après qu’il a eu dépouillé son mari. À présent, elle est veuve. Il l’aime férocement, comme on aime une vengeance ; il l’aime jalousement, car elle va se remarier avec un officier qu’elle n’a jamais cessé de chérir. Mais elle a un fils, élève à l’école militaire de Turin, qui signe des billets, et finit par commettre un faux : le faux est dans les mains du banquier Barbarò di Panigale. Il faut que la marquise de Collalto l’épouse, si elle veut sauver son fils du déshonneur. Elle l’épouse.

L’argent, toujours l’argent ! Le personnage grandit, de degré en degré, jusqu’à l’apogée de la puissance et du bonheur. Un jour de crise, une grande banque milanaise risque de suspendre ses payemens, faute de numéraire immédiatement disponible. Personne ne possède la somme nécessaire ; personne, sauf notre héros. Pour le coup, il acquiert ce qui lui manquait encore : la considération publique. Il l’augmente en fondant des écoles et en dotant des hôpitaux ; il devient le bienfaiteur de Milan. On lui décerne une médaille d’honneur, qu’on vient lui offrir en grande pompe.

Alors il pleure d’émotion ; et devant sa femme la marquise de Collalto ; devant son fils, qu’il a brisé ; devant sa belle-fille, qui s’appelle Giulia Alamanni, il s’écrie, la voix entrecoupée de sanglots : « Faites… Faites toujours le bien, mes enfans… Vous y trouverez une grande satisfaction. »

Balzac, traitant les mêmes sujets, a laissé des analyses plus