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s’écriait un autre protestant, Senfît Pilach, cette liberté spirituelle, cette liberté chrétienne, à laquelle la Prusse devait sa grandeur ?

Le national-libéral Wehrenpfennig fit accepter un amendement qui multipliait encore, pour les patrons des églises ou pour les communes, les occasions d’intervenir, à l’écart de l’évêque, dans le fonctionnement de la vie ecclésiastique. Mais une revanche imprévue survint aux catholiques : l’État par un article se réservait le droit d’affamer les chanoines, qui, fidèles aux évêques déposés, se refuseraient à établir une nouvelle administration diocésaine ; ce qu’il y avait de gênant et d’odieux dans un tel moyen de pression, fit repousser l’article. C’était un succès tout épisodique, le premier que depuis quatre ans les catholiques eussent remporté ; c’est à l’éloquence de Mallinckrodt qu’ils le devaient. Quelques semaines après, un mal rapide éteignait cette grande voix ; ils avaient ouvert le mois de mai en souriant à un vainqueur, ils le terminaient en pleurant sur un mort.


VII

Il n’était pas dans l’esprit d’un Mallinckrodt que l’on s’attardât à pleurer lorsque des lois venaient d’être votées qui permettaient à l’État d’annuler l’autorité des évêques en y substituant d’autres autorités et de fouler aux pieds le droit civique des gens d’Eglise en les jetant hors d’Allemagne. À vrai dire, il se trouvait des observateurs dans les cercles de la Cour, pour augurer encore, au lendemain même de ces terribles menaces, que la paix était proche, soit qu’ils crussent à l’immédiate efficacité de ces armes suprêmes, soit qu’ils eussent entendu parler des discrets coups de sonde jetés à Rome par Bismarck. « Tout va mieux que cela n’en a l’air, écrivait avec un curieux optimisme Charles-Antoine de Hohenzollern. La querelle ecclésiastique est près d’être paralysée. Il n’y aura pas, sans doute, la paix entre Rome et Berlin, mais on saura bien trouver un modus vivendi. » Mais les évêques au contraire, sans se laisser assoupir par de tels pronostics, se disposaient à des luttes plus acharnées. Le peuple les regardait ; il se préparait à écouter les décisions qui régleraient, en face des lois nouvelles, l’attitude de l’Eglise. Les deux archevêques prussiens étaient en prison ; et Guillaume, à qui l’administrateur épiscopal de Fulda demandait pour eux