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notamment de Jacques Cone en 1398. Il s’ensuit que les prétendues influences flamandes aperçues chez nos grands artistes de Bourges, de Tours, d’Avignon au XVe siècle sont en réalité les traditions françaises du XIVe siècle importées dans les Flandres et tout bonnement, conservées chez nous. »

Après les ouvrages de M. Georges Lafenestre sur les Primitifs à Bruges et à Paris et sur l’Exposition des Primitifs français, — du comte Paul Durrieu sur la Peinture à l’Exposition des Primitifs français, — qui tous deux concourent à rendre justice à l’originalité et à l’activité de vieux maîtres français, et qui ont apporté le résultat de longues recherches appuyées sur une solide érudition, la publication entreprise par M. Jean Guiffrey, la Peinture française I : les Primitifs[1], répond au désir des plus éminens critiques d’art, de voir reconstituer d’une façon suivie, après des siècles d’abandon et d’indifférence, les pages de ce premier chapitre des Annales de l’art français, avec ce qui en subsiste sur bois, sur toile, ou sur toute autre matière, et qu’il est souvent si difficile de reproduire d’après les originaux.

Dès le XIIIe siècle, une école de peinture distincte pour le style ayant fleuri au cœur même de la France, dans le domaine royal, et spécialement à Paris, le distingué conservateur du Musée du Louvre a voulu du grand naufrage de la vieille peinture de France grouper les épaves et réveiller la gloire de nos plus vieux artistes du moyen âge et de la Renaissance, de ceux que l’on a justement appelés les « peintres de vérité. » Parmi ces peintures murales, ces retables tableaux à sujets civils ou religieux, portraits d’origine française que l’on trouve encore dans les églises ou les palais, dans les galeries publiques ou privées, les éditeurs n’ont retenu que les œuvres qui n’ont pas subi l’influence des maîtres italiens attirés par François Ier. Beaucoup d’entre elles assurément sont déjà connues, mais la principale originalité du travail est de fournir un certain nombre de planches de détails reproduisant parfois en grandeur naturelle des fragmens particulièrement intéressans qui constituent des documens précieux pour la comparaison de ces vestiges vénérables de l’art délicat de nos vieux peintres avec d’autres œuvres. Ce sont, dans ce premier album : la Madone, le Calvaire, l’Adoration des Mages, du Musée du Bargello à Florence ; — le Couronnement de la Vierge d’Enguerrand Charonton, du Musée de Villeneuve-lès-Avignon, travail de plus d’un an, qui fut payé au peintre 120 florins, à peu près

  1. Librairie centrale d’art et d’architecture.