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sert d’aliment, et la feuille, de fourrage. Il préconisait l’introduction en Tunisie des vaches laitières de Sicile, si indifférentes aux brûlantes sécheresses de l’été.

De nombreuses associations italiennes protègent les immigrans. Ainsi, le « Patronage des émigrans, « fondé en 1904, concentre les demandes, les offres de travail et facilite les rapports entre patrons. Jadis, il arrivait trop d’Italiens ; l’offre dépassant la demande produisit l’avilissement des salaires. Le « Patronage » signala cette anomalie à Rome, et le commissaire général de l’Emigration mit tout au point. Sur son rapport motivé, un décret subordonna le départ des ouvriers à l’assurance de trouver, à l’arrivée, un emploi rétribué convenablement et d’une certaine durée.

La « Société italienne de bienfaisance, » fondée en 1898, reçoit 12 000 francs du gouvernement italien et 1 000, de la Tunisie. Outre les secours qu’elle distribue, elle fait d’importantes dépenses au titre des rapatriemens (moyenne : 2 000 individus par an).

Enfin, la Cooperativa italiana di credito, fondée en 1900 et encouragée par l’éminent M. Luzzatti, contribue à conjurer les petites crises locales.


II

Malgré la cordialité franco-italienne, nous avons le devoir de scruter la mentalité de ces immigrans si nombreux. Politiquement, les rapports sont bons. M. Loubet, en visite officielle à Tunis, reçut le consul d’Italie et les présidens des associations italiennes ; il fit répartir une somme d’argent entre la Société de bienfaisance et l’hôpital italiens. Le Résident général envoie, en temps ordinaire, un représentant aux distributions de prix des écoles italiennes. Il fut une époque, heureusement lointaine, où la froideur des relations ne comportait point ces prévenances : les deux populations juxtaposées s’ignoraient, ou presque. C’était la suite des malentendus remontante l’époque crispinienne. Le temps a clarifié la situation. En 1905, devant les étudians touristes, M. Mascia remémora en quelques mots heureux l’ancienne confraternité d’armes des deux peuples : « En parcourant les rues de Tunis, vous rencontrerez des zouaves et de pimpans