Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 59.djvu/664

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

socialistes anglais ne pensent pas de même en matière de désarmement. Le leader du parti social-démocrate, Hyndman et ses amis font au contraire campagne en Angleterre pour l’augmentation de la flotte. La présence de M. Hyndman au Congrès eût fort embarrassé les Allemands. Keir Hardie les gênait dans un autre sens. Il présentait une résolution aussi précise que celle de M. Vaillant. Il demandait que des dispositions fussent prises en cas de guerre, afin de préparer la paralysie générale du monde, l’arrêt des transports en premier lieu.

On ne put s’entendre à la Commission, ni à une sous-commission, sur un texte commun : Ledebour, au nom des Allemands, s’en tenait aux termes du Congrès de Stuttgart, « arrêter la guerre par tous les moyens, » sans spécifier ces moyens. Vaillant et Keir Hardie, d’ailleurs en minorité, maintenaient leur grève, ne lâchaient pas leur insurrection.

Les deux ordres du jour furent donc soumis au Congrès. Le texte allemand proteste contre les armemens croissans, les embarras financiers qui en résultent et qui retardent les réformes sociales. Il réclame l’arbitrage, le désarmement simultané, la suppression des traités secrets, une garantie internationale de l’indépendance de toutes les nations. Il rappelle la décision antimilitariste de Stuttgart, et confie au bureau socialiste international le soin de faire l’entente entre les partis ouvriers pour une action commune, afin d’empêcher la guerre.

Le rapporteur Ledebour a développé devant le Congrès ce texte de la majorité de la Commission. Ledebour, ancien acteur, si nous ne nous trompons, compte dans le parti allemand parmi les plus radicaux. Il a expliqué le refus d’insérer la grève parmi les moyens appropriés d’empêcher la guerre. Les syndicats, a-t-il dit, doivent s’éclairer sur ce point, se rendre compte s’ils sont capables de l’exécuter. Mais celui qui propose la grève générale doit avoir moralement le droit de le faire. Or, Ledebour dénie ce droit aux camarades anglais, attendu qu’à la Chambre des Communes, ils votent l’ensemble du budget, y compris les dépenses guerrières. Ces mots ont soulevé une grande agitation : on a rappelé à l’orateur le cas des socialistes badois. Ledebour ajoutait que ce qui devait encore encourager le Congrès à prendre position contre la guerre, c’était le discours que l’Empereur allemand, porte-parole du militarisme et du capitalisme, venait de prononcer à Kœnigsberg, vrai cri