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agrément des retours dans ces cités si riches en chefs-d’œuvre ; parmi ceux-ci on a des amis qui, peut-être, vous rendent un peu injuste pour les autres, mais dont il est si doux de savoir par avance l’accueil.

Modène fut toujours un peu délaissée par les touristes qui n’en parlent pas ou ne la mentionnent que comme une halte de leur voyage. Si le président de Brosses en garda un tendre souvenir, c’est qu’il y arriva en plein carnaval. A vrai dire, on ne devait pas s’ennuyer alors à la cour du duc et de la duchesse de Modène et ce n’est qu’à regret, sur la route du retour, que le bon Bourguignon quitta la ville où il avait rencontré une compatriote, « mademoiselle Grognot, jadis danseuse à l’Opéra-Comique, favorite de mademoiselle Salle, à ce que portait la chronique, aujourd’hui première sautilleuse du duché de Modène, et fort avant dans les bonnes grâces de certaines dames de la ville. »

Pour celui qui, comme moi, recherche seulement, dans chacune de ces cités italiennes, ce qu’il y a de meilleur, Modène se résume facilement : une très belle cathédrale et une école de sculpture en terre cuite. Sa galerie de peinture renferme des œuvres importantes pour l’étude des diverses écoles émiliennes dont les peintres si nombreux sont si mal connus, et nous y trouvons un nouvel et remarquable exemple de cette heureuse décentralisation qui faisait de chaque ville un foyer d’art ; mais, par ces lumineuses matinées, d’été, je passe sans regret devant la porte du Musée. Il est plus agréable d’aller rêver sur les vieux remparts qui, comme à Parme, entourent la cité d’une ceinture ombragée et d’où l’on voit la ligne sombre des Apennins s’estomper peu à peu, avec la chaleur grandissante, dans une brume bleue.

La décoration extérieure du Dôme de Modène est, parmi les églises romano-lombardes, l’une des plus riches et des plus complètes. Elle ne se borne pas à la façade et se poursuit sur les côtés. Une gracieuse galerie court tout autour de l’édifice, avec de fines colonnettes encastrées par groupes de trois dans des arcades plus grandes. Les différentes portes s’ouvrent sous des voûtes soutenues, comme il est de règle, par des lions ; les deux principales, celle sous la rosace et celle qui donne sur la Piazza Maggiore, sont majestueuses et d’un bel effet ; peut-être