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à la satisfaction commune de l’administration et du public.


Après cet exposé sommaire, aussi impartial que possible, sur la situation réelle de Madagascar, les conclusions semblent s’imposer évidentes. La réalisation d’un programme de voies de communication permettant une circulation intense de transports par traction animale ou automobile, la construction de chemins de fer d’intérêt local, l’aménagement des ports, la protection des populations indigènes et surtout de la race hova contre les influences funestes qui arrêtent leur accroissement, sont d’impérieuses et d’immédiates nécessités. Des primes généreuses à l’élevage des bœufs et des chevaux auraient pour conséquence la suppression du portage humain qui fait tant de victimes et cause tant d’abus. Une politique avisée à l’égard des missionnaires assurerait à la colonie les bienfaits d’un corps enseignant nombreux, habile et peu coûteux. La réorganisation de l’Assistance médicale favoriserait le recrutement ultérieur de la main-d’œuvre locale par l’abaissement de la mortalité. La facilité, la rapidité, le bas prix des voyages et des transports encourageraient les recherches et les tentatives des industriels, des agriculteurs et des commerçans. L’appel à l’immigration étrangère serait une mesure transitoire utile à la petite colonisation ; les Grecs qui viennent si volontiers dans l’île sauraient mettre en valeur quelques districts de l’Emyrne et du pays betsiléo grâce à leur rusticité, leur endurance, leur adaptation naturelle au climat ; un millier de familles annamites transformerait en peu d’années les marais des Pangalanes en riches rizières ; des Malais aideraient les Hovas à pratiquer l’élevage ; Hindous, Chinois, nègres de l’Afrique occidentale fourniraient la main-d’œuvre indispensable aux grands travaux publics.

De nombreux millions seraient nécessaires. Notre colonie est aujourd’hui trop pauvre pour les souscrire ou les gager. Seul, un emprunt garanti par la France, et dont les charges diminueraient avec la prospérité croissante de l’île, donnera les ressources qui font défaut. La situation actuelle ne peut se prolonger longtemps sans compromettre l’avenir de la colonisation et rendre improductifs les sacrifices déjà faits pour la conquête et la pacification de Madagascar.


PIERRE KHORAT.