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émue par une série de malheurs comme nous n’en avons pas connu.


Ainsi, pour le moment, il ne faut pas compter qu’un équipage puisse revenir tout seul. Il demeurera emprisonné jusqu’à ce qu’on l’aille délivrer. Le plus souvent, un sous-marin coulé ne renfermera que des morts. Parfois cependant, comme dans le cas du Farfadet, on aura pendant plusieurs jours quelques chances d’y trouver des vivans. Les secours ne sauraient être immédiats : ils nécessitent un matériel spécial et généralement des scaphandriers particulièrement entraînés. On perd du temps à chercher l’épave. C’est pour cette raison qu’on a muni nos sous-marins de bouées qu’on peut décrocher de l’intérieur. Elles viennent signaler remplacement du naufrage et donner communication avec les naufragés.

Ce n’est pas le tout de leur parler : il faut leur ouvrir la porte et sans les noyer incontinent. Des pléiades d’inventeurs ont proposé d’ajuster sur la coque, en des endroits préparés d’avance, des conduits pour injecter de l’air ou des substances alimentaires. Certains de ces dispositifs offriraient passage aux hommes. Le plus simple consiste en une grande manche renforcée intérieurement par un tube de tôle.

On oublie trop les aléas d’opérations si malaisées au sein de la mer, sur une épave. Les scaphandriers travaillent trop difficilement pour réussir un joint étanche. Et c’est par exception que le bateau englouti reposera d’aplomb sur un sol plan. Si l’orifice de raccordement se trouve incliné, latéral, peu accessible, l’opération devient inexécutable. Sa réussite suppose encore que les mouvemens imprimés par la mer au bateau de surface qui porte l’extrémité libre du tube de secours se réduiront à presque rien. En regard de toutes ces incertitudes, il faut mettre le danger certain créé à bord du sous-marin même du seul fait qu’elle existe, par toute installation nécessitant des trous plus nombreux dans la coque ou plus d’encombrement à l’intérieur. Il n’y faudrait pas non plus introduire des appareils qui prissent la place, ou le poids disponible, nécessaires aux organes militaires.

Il ne semble pas jusqu’ici qu’on soit en mesure de sauver les hommes sans relever le bâtiment. Quelque progrès qu’on réalise, il peut rester des cas où les prisonniers demeureront