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procédait comme il a fallu faire pour le Farfadet et le Lutin. Avec le Pluviôse, on dut s’y prendre un peu autrement, faute d’un dock flottant ; en pareil cas, on conduit des chalands au-dessus du bateau coulé ; les entourant de solides aussières, on y fixe les chaînes qu’on a pu mailler sur l’épave. À mer basse, on tend ces chaînes. La marée montante soulève les chalands, et il faut ou que la chaîne casse, ou que le chaland tenu par elle s’enfonce et sombre, ou enfin que le sous-marin se décolle du fond et remonte de l’amplitude de la marée. S’il remonte, on s’empresse de l’emporter plus près du rivage là où les fonds sont moindres, jusqu’à ce qu’il touche de nouveau. La marée qui baisse permet de gagner d’autant sur la longueur des chaînes, et l’on recommence.

Avec un dock flottant, les opérations sont plus rapides. Le dock est fait pour pouvoir à volonté s’enfoncer au ras de l’eau, par le remplissage de réservoirs spéciaux, ou reprendre sa flottaison normale. Ainsi l’on produit artificiellement, et en petit, les dénivellations verticales qu’avec les chalands il fallait attendre des marées. Sauf cette différence, on agit de même, en se rapprochant à chaque fois du rivage. Un dernier avantage du dock, s’il est aménagé à cet effet, consiste à s’en rapprocher plus que les chalands ; à entrer, par exemple, avec son fardeau, dans un port de moindre profondeur. Lorsque les chalands, en effet, se superposent au bâtiment suspendu sous eux, fût-ce sans intervalle, le tirant d’eau de cet ensemble flottant demeure considérable ; le dock, lui, peut-être fait comme une voûte, entre les bras de laquelle vient finalement s’encastrer l’épave. C’est la forme donnée en Allemagne au Vulkan, qui doit opérer à la façon d’un dock. Il porte aussi des appareils de hissage mécanique, dont l’emploi suffirait vis-à-vis de poids modérés.

Un dock flottant figure au programme naval soumis par l’amiral de Lapeyrère au Parlement. Il ne se trouvera personne pour s’opposer à sa construction. Peut-être même en réclamera-t-on plusieurs. Mais, dans la plupart des cas, ce n’est pas ce qui peut sauver le personnel ; et comme le prix à prévoir par unité dépasse 1500000 francs pour la dimension appropriée aux submersibles en projet[1], les marins estimeront que c’est assez donner à un matériel sans emploi au combat.

  1. 2 700 000 francs en prévoyant la possibilité de lever 1 000 tonnes. Voyez le discours du ministre de la Marine 4 la Chambre des Députés, le 30 juin 1910.