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dit, ne valent même pas mieux que les catholiques. » Si l’intérêt de l’Etat exigeait que Bismarck ennuyât les Polonais et sourit aux nationaux-libéraux, de quoi se mêlaient tous ces pasteurs, de parler et d’agir à l’encontre ?

Les pétitions protestantes et catholiques affluaient contre le projet de loi ; il en arrivait, de toute la Prusse, 19 053, et l’on ne rangeait même pas, dans ce nombre, les feuilles de signatures venues de la Pologne, qui, naturellement, ne valaient pas la peine d’être comptées. Au nom de la Constitution prussienne, les évêques se plaignaient : ils n’écrivaient plus au Roi, mais directement aux Chambres. La presse bismarckienne trouvait le moyen, par des menaces contre les Jésuites, de maintenir un fossé entre les conservateurs, qui détestaient la Société de Jésus, et le Centre, qui la défendait ; mais par-dessus ce fossé, les mains se tendaient encore, se rencontraient toujours, pour concerter des gestes communs contre la politique scolaire, si formellement laïque, dont Falk allait être l’actif représentant. Bismarck, qui ne mettait les hommes du Centre au ban de l’Empire que pour enlever à l’extrême droite et à l’extrême gauche la tentation de coqueter avec eux, voyait s’ébaucher entre certaines personnalités des deux Eglises la concentration même à laquelle ils aspiraient. Les portes de cette fraction s’ouvraient, toujours plus larges, pour tous les protestans épris de liberté religieuse et attachés au règne de Dieu.


III

Pendant qu’on s’agitait, dans l’ombre, pour ou contre la réforme de l’inspection scolaire, Bismarck et Falk, dès le 30 janvier 1872, subissaient à la Chambre une interpellation du Centre. Auguste Reichensperger, Mallinckrodt, Windthorst, demandèrent pourquoi, l’année d’avant, la « division catholique » avait été supprimée. Ils démontrèrent que désormais les affaires d’Église, au ministère, étaient réglées par des bureaux protestans, que l’esprit d’équité périclitait, que la « parité » des deux confessions était par-là même violée. C’est en leur répondant que Falk fit ses débuts oratoires et que Bismarck, pour la première fois, prit la question religieuse comme thème d’un grand discours parlementaire. Falk allégua que deux conseillers catholiques gardaient un poste au ministère ; cela lui paraissait suffisant.