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l’ignorons. Quoi qu’il en soit, il espérait qu’au moyen du vote secret, les consciences se libéreraient des engagemens récemment pris, et qu’un certain nombre de députés, qui avaient publiquement promis aux électeurs de voter la représentation proportionnelle, voteraient sournoisement contre elle dans l’ombre discrète du scrutin. Nous ne sommes pas, loin de là, les adversaires du scrutin secret ; nous regrettons même qu’il ne soit pas employé plus souvent dans nos assemblées. Il affranchit, en effet, le député, de la contrainte morale que les influences du dehors cherchent à exercer sur lui. Mais il n’y a pas de vérité assez générale pour ne souffrir aucune exception, et lorsque, au sortir des élections, la Chambre se trouve en face d’une des questions qui ont joué le plus grand rôle sur le terrain électoral, la publicité du scrutin sur cette question s’impose impérieusement. M. Jaurès l’a dit avec chaleur. Ce n’est guère notre habitude d’être d’accord avec lui, mais les partis ont provisoirement disparu devant la grande idée de justice dont la représentation proportionnelle est l’expression. Des hommes venus de tous les points de l’horizon politique se sont unis pour faire prévaloir la réforme, et M. Jaurès a été l’un d’eux. Il a convaincu la Chambre, il l’a entraînée. Si M. Breton a fait passer sa proposition, M. Jaurès a fait aussi passer la sienne, et le plan des arrondissemens a été déjoué. Ils voulaient de l’ombre en effet, et on les a condamnés à la lumière. Nous espérons bien que, même sans cela, les 322 amie de M. Charles Benoist seraient restés fidèles à leurs promesses ; mais M. Breton, qui en doutait, peut maintenant être sûr qu’ils ne faibliront pas. Tel a été le résultat de son intervention.

La première commission à nommer est celle du budget. La Chambre n’a pour le moment rien à faire, sinon de voter les quatre contributions directes ; après quoi, elle pourra aller se reposer pendant trois mois de ses fatigues électorales et de ses premiers travaux. Rien, en effet, n’est encore prêt pour la discussion : les commissions auront à travailler pendant les vacances pour qu’il en soit autrement à la rentrée. Si c’est là un devoir pour plusieurs d’entre elles, c’en est un surtout pour celle du budget. Il semble que, pour le moment, elle n’ait pas une tâche bien difficile à remplir, le budget qu’a déposé M. Cochery étant d’une simplicité sans précédens depuis de longues années ; mais ce n’est qu’un commencement de budget, et M. Cochery aurait pu écrire à la dernière page : la suite au prochain numéro. Notre situation financière serait très satisfaisante s’il suffisait, pour la mettre en équilibre, des 12 millions d’impôts nouveaux qu’il demande aux timbres sur quittancés. Malheureusement il n’en est pas ainsi. M. le ministre des