Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 58.djvu/477

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du bien et du mal. La politique d’un seul groupe, lorsqu’elle prévaut à l’exclusion de toute autre, est la pire de toutes : elle devient facilement tyrannique, on l’a vu au cours de ces dernières années. Cependant il est inévitable et nécessaire que la différence des opinions produise, dans une assemblée quelconque, des groupemens différens. C’est le seul moyen de se reconnaître. Jusqu’ici, les groupes avaient existé, ils s’étaient formés ou déformés sans avoir un caractère officiel ; on y causait, on y délibérait, on y prenait des décisions qu’on s’efforçait ensuite d’appliquer en séance ; mais leur rôle s’arrêtait là. Il n’en sera plus tout à fait de même désormais. Les groupes, en effet, ont été amenés à se constituer plus solidement qu’autrefois et à fournir la liste de leurs membres de manière à en fixer le nombre. Enfin le Journal Officiel a publié des listes, ce qui a permis de voir un peu plus clair dans la composition de la Chambre. Un peu plus seulement ; beaucoup de nouveaux députés ne se connaissent pas encore très bien eux-mêmes, pas plus qu’ils ne connaissent le groupe auquel ils se sont affiliés. Il faudra voir ce que la vie en commun fera de ces premières classifications. Certains groupes surtout se sont déjà montrés plus ou moins divisés, et cela est particulièrement vrai des radicaux socialistes dont le plus grand nombre ont voté pour le ministère, mais dont quelques-uns, et non des moins qualifiés, ont voté contre lui. Pour le moment, la situation est la suivante. Le groupe radical socialiste, le plus important par le nombre de ses membres, en compte 149 ; la gauche radicale en compte 112 ; les progressistes 76 ; le groupe du parti socialiste 75 ; la gauche démocratique 73 ; l’Action libérale 34 ; le groupe républicain socialiste 30 ; le groupe des droites 19 ; le groupe des indépendans 20. Les groupes sont nombreux, on le voit ; il y en a plus qu’il n’en faudrait. Des coalitions se formeront entre eux ; reste à savoir lesquelles.

Pourquoi cette organisation nouvelle des groupes ? Pourquoi la consécration officielle qui lui a été donnée, en quelque sorte ne varietur ? Tout cela aurait été inutile et dès lors aurait paru gênant dans les assemblées précédentes ; mais dans celle-ci, lorsqu’on a été à la veille de procéder à la formation des grandes commissions, nommées pour la durée de la législature, l’idée est venue aux esprits et elle a été favorablement accueillie qu’il conviendrait d’y faire représenter, suivant leurs forces respectives, les différentes opinions de l’Assemblée. C’est en somme, sous une forme particulière, l’idée de la représentation proportionnelle. Voici comment on procédait autrefois pour la nomination des commissions. Tous les mois, un tirage