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devoir, et c’était en même temps la conséquence logique de l’initiative prise par lui dans la question. Il avait provoqué ces grandes assises ; il lui appartenait de donner l’exemple d’une exécution immédiate de leurs résolutions.

La situation est la même aujourd’hui. L’œuvre accomplie est sienne. En invitant cette fois encore les gouvernemens à une délibération commune, il s’est moralement engagé, vis-à-vis de l’opinion en même temps que vis-à-vis d’eux-mêmes, à poursuivre jusqu’au bout une tâche dont l’accomplissement ne dépend plus aujourd’hui que de lui. Nous avons la confiance que, fidèle à lui-même, il saura la remplir avec décision.

Et maintenant, il faut conclure. Nous l’avons déjà dit : l’œuvre des deux conférences est un des faits les plus considérables qu’ait encore accomplis dans l’ordre moral le concert des nations, Est-ce un rêve d’espérer que cette œuvre nouvelle ne sera pas sans lendemain, qu’elle pourra devenir une semence féconde et ouvrir des horizons nouveaux à l’humanité ? Les intérêts moraux, objets du concert actuel, sont-ils en effet les seuls qui puissent utilement motiver des ententes internationales ? Et la misère, et la protection des faibles, et la préservation sociale, et tant d’autres objets non moins dignes des sollicitudes mondiales ?

Pour ne parler que du dernier point, la préservation sociale, certains crimes ne sont-ils pas devenus cosmopolites par la facilité des communications, par les ententes, inconnues jusqu’ici, entre malfaiteurs de pays différens ? Ne trouvent-ils pas, dans les règles étroites qui limitent l’action pénale, de sûrs moyens de se soustraire au châtiment ?

Là encore un remarquable précédent vient d’être créé. De simples délits ont été l’objet de règles communes propres à en assurer partout la recherche et la répression. Est-il téméraire d’entrevoir le jour où le monde pourra se protéger par des moyens semblables contre la grande criminalité ?

Qu’il nous soit permis de terminer cette étude sur ce ferme espoir.


R. BERENGER.