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filiale, la fidélité aux devoirs de son état, le respect des propriétés, l’amour de l’ordre, du travail ; la décence, le goût de la propreté et le mépris des vanités. Ils les pénètrent sans cesse de la présence de Dieu ; tous les exercices commencent et finissent par la prière.

ART. XII. — Les maîtres et maîtresses, en formant leurs élèves à la piété, n’oublieront pas de les former aux vertus sociales. Ils leur inspireront le respect pour les personnes en place, le respect pour la vieillesse, le respect pour les femmes ; la docilité et la reconnaissance pour ceux qui les instruisent, les égards pour leurs semblables et pour ceux qui servent ; un tendre intérêt mêlé de respect pour les personnes infirmes ; la pitié pour tout ce qui a vie, pour tout ce qui est faible et dépendant ; l’horreur du mensonge, la fidélité à tenir sa parole ; la douceur, la patience dans les privations ; la générosité envers ceux qui les obligent, l’honnêteté envers tous. Enfin ils ne cesseront de leur mettre sous les yeux le plus parfait modèle de l’enfance, Jésus-Christ, dont l’Évangile dit qu’il croissait en âge et en sagesse devant Dieu et devant les hommes.


Tel est le règlement que promulguèrent en décembre 1795, sous le Directoire, des évêques républicains dont le chef était le montagnard Henri Grégoire, ancien membre de la Constituante et de la Convention, député au Conseil des Cinq-Cents, l’homme de France qui haïssait le plus les rois et la royauté. La morale que préconise ce règlement est sans doute le contraire de la morale indépendante ; qui oserait dire cependant que les enfans élevés de cette façon-là ne devaient pas être un jour les citoyens d’une République idéale, infiniment plus parfaite que celles de Platon, de Fénelon ou de Jean-Jacques ?

Mais, dira-t-on peut-être, ce ne sont là que de belles rêveries ; le papier souffre tout, et il y a loin du principe à l’application. Et d’ailleurs, quelle autorité pouvaient avoir, quelle influence pouvaient exercer cinq ou six évêques désavoués par le Pape, suspects à une infinité de catholiques en raison de leur serment schismatique et de leur intrusion, et enfin très compromis aux yeux des honnêtes gens par les scandales et par les apostasies de plusieurs d’entre eux, les Lindet, les Torné, les Minée, les Gobel ? Il est évident qu’un épiscopat reconnu par le Souverain Pontife aurait eu plus d’autorité : voyons néanmoins, d’après les faits eux-mêmes, quelle a été la fortune de cette seconde lettre encyclique en ce qui concerne les écoles. La chose en vaut la peine, car les divers auteurs qui ont étudié jusqu’ici l’Instruction publique de l’époque révolutionnaire ne paraissent pas avoir tenu compte de cette intervention des évêques réunis.