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communiquer à tous, dans la langue que tous comprennent. Ils hérissent leurs travaux d’un appareil mathématique terriblement rébarbatif. La langue algébrique leur est commode : elle leur est claire ; elle est comme une sorte de sténographie incomprise du public et qui leur économise le temps. Il faut donc la traduire : il faut faire apercevoir par-dessus le squelette dont ils se contentent, la figure réelle et harmonieuse de la vérité.

C’est ce que nous voudrions faire ici, en exposant quelques-unes de ces surprenantes histoires que les étoiles nous ont racontées récemment.


I. — STRUCTURE DU MONDE STELLAIRE

Avant de montrer comment on a pu, récemment, mesurer, malgré leur prodigieux éloignement, la température et les dimensions des étoiles, et scruter les formes nouvelles qu’y prend la matière, il sera utile d’indiquer à grands traits ce que les plus récentes découvertes nous ont appris d’essentiel sur la structure générale de cet univers stellaire où notre soleil n’est qu’une simple cellule.

Lorsqu’un arpenteur veut mesurer l’altitude d’un point difficilement accessible, comme le sommet d’un clocher, il le vise, au moyen d’une petite lunette, en se plaçant successivement à une certaine distance d’un côté et de l’autre ; un niveau dont est muni l’instrument permet de connaître les deux angles faits successivement par la ligne de visée avec l’horizontale, et il suffit de connaître la distance des deux points d’où les visées ont été faites, et qu’on nomme la base, pour en déduire facilement l’altitude cherchée.

C’est par un procédé analogue et en prenant la plus grande base qui soit à notre disposition, c’est-à-dire l’intervalle entre les deux positions extrêmes que la Terre occupe à six mois d’intervalle dans son orbite autour du Soleil, qu’on a réussi depuis le siècle dernier à mesurer les distances de quelques dizaines d’étoiles. On sut ainsi que la plus rapprochée de nous, du Centaure, est près de 300 000 fois plus loin, et Véga, la belle étoile bleue de la Lyre, plus d’un million de fois plus loin que le Soleil. Il fut alors facile de calculer que si celui-ci, au lieu d’être près de nous (c’est-à-dire à 150 millions de kilomètres