Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 57.djvu/484

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pelletan, avait montré pour lui une faiblesse qui devait l’encourager à persévérer, mais que n’a pas imitée son successeur, M. Thomson. M. Thomson a refusé de recevoir M. Goude et l’a incité à se tenir à sa place, sur un ton qui n’admettait pas de réplique. L’incident a fait alors quelque effet, et, pendant quelque temps, on n’a plus entendu parler de l’agitateur. Mais il préparait sa candidature et l’a effectivement posée pour représenter à la Chambre quoi ? l’indiscipline et la révolte : il ne saurait pas y représenter autre chose. Le 24 avril, M. Goude avait été mis en ballottage ; il était en tête, il risquait d’être élu. Tous les autres candidats se sont effacés au profit de l’un d’entre eux qui devait passer, si leurs voix se reportaient sur lui : il s’agissait avant tout de s’opposer au scandale que devait être l’élection de M. Goude. C’est alors que le Comité exécutif du parti radical et radical-socialiste est intervenu, et qu’a-t-il fait ? On aurait pu croire qu’il aurait recommandé aux élections le concurrent de M. Goude : il leur a recommandé M. Goude lui-même. Ce comité n’est pourtant pas composé d’énergumènes ; d’y a là des hommes comme M. Léon Bourgeois et M. Vallé. Sans doute ils n’approuvent ni les théories, ni la conduite de M. Goude ; mais ce sont des faibles, et ils tremblent à la pensée de se brouiller avec lui et avec les forces qu’il représente. L’Alliance républicaine démocratique, présidée par M. Adolphe Carnot, qui autrefois s’est laissé entraîner, elle aussi, à des complaisances regrettables, a trouvé que c’était trop. elle pouvait d’autant moins se taire qu’elle avait donné son estampille au concurrent de M. Goude et que, dès lors, la manifestation du comité radical-socialiste paraissait dirigée contre elle. Sa protestation a été très énergique avant l’élection ; elle l’a renouvelée depuis, et nous n’en serions peut-être pas où nous en sommes si elle avait eu toujours l’attitude aussi nette et la parole aussi ferme. Mais le mal était fait, d’était irréparable. M. Goude a été élu avec le concours officiel d’un groupe représentant une fraction de la majorité gouvernementale, alors qu’un autre groupe, représentant une autre fraction de la même majorité, soutenait un autre candidat. Que feront demain les adhérens de l’Alliance républicaine à la Chambre ? Se contenteront-ils de leur protestation écrite et continueront-ils de manœuvrer avec les radicaux-socialistes qui leur ont donné un soufflet public et les ont finalement battus à Brest ? Reprendront-ils, au contraire, leur indépendance, comprenant qu’ils ont joué jusqu’ici un métier de dupe ? Dans le premier cas, rien ne sera changé à la majorité d’hier. Dans le second, d’pourra en être autrement. Après les élections, des rapprochemens, des ententes sont de