Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 57.djvu/211

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
205
LA TRANSFORMATION DE LA CHINE.

les exécutent que s’ils le veulent ou le peuvent, et autant dire qu’avec un pareil dualisme, la plupart des décisions de Pékin restent lettre morte dans les provinces. Examinant ensuite l’une après l’autre, chaque ordre de réformes, et comparant les projets et les rapports qui les ont provoquées, les édits qui s’y rapportent et les résultats obtenus, ils croient pouvoir avancer qu’en définitive, à peu près rien de ce que l’on prétend avoir fait n’existe autrement que sur le papier.

Mais ces opinions pessimistes ont trouvé des contradicteurs. Ceux qui croient à la transformation définitive de la Chine font remarquer que les critiques ne sauraient prévaloir contre l’ensemble des résultats obtenus : d’ailleurs le temps qui s’écoule leur fait perdre de leur valeur et de leur portée. Chaque jour voit se consolider l’œuvre de rénovation de la Chine. Malgré les incidens et les à-coups, la réorganisation de l’armée chinoise continue, les formations actives ont même commencé à encadrer leurs réserves, et deux divisions peuvent aujourd’hui compléter leurs effectifs de guerre au moyen des réservistes. Les dernières décisions prises par le gouvernement sont une preuve indéniable qu’on entend persévérer dans la voie de la réorganisation de l’armée : elles peuvent être considérées comme réduisant à néant les objections tirées du peu de stabilité de cette organisation par suite du manque de fonds. Le ministre de la Guerre, Tié-Liang, ayant exposé au milieu de l’année 1909 qu’un certain nombre de provinces n’avaient pu, faute d’argent, former de troupes à l’européenne, — de sorte qu’il était à craindre qu’on ne pût arriver, comme on l’avait cru, à la complète organisation de trente-six divisions dans le délai fixé, — le régent a ordonné de prendre immédiatement les mesures financières pour trouver les ressources nécessaires à l’organisation prévue de l’armée chinoise et d’obliger les provinces à fournir ces fonds. Et il en serait de même de la plupart des autres objections. Dans l’enseignement, la pénurie des professeurs se fait sentir moins vivement d’année en année, l’élan vers les études occidentales étant général. En tout cas, on ne manquera pas de professeurs compétens quand aura cessé la période de transition de six années pendant laquelle on a maintenu les anciens examens pour ne pas léser les droits de ceux qui s’y étaient antérieurement préparés, et quand les examens modernes ouvriront seuls désormais accès aux carrières publiques. D’autre part, si l’extension