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L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES PRIVÉES
DEPUIS SEPT SIÈCLES[1]


III

LE SERVICE DE TABLE ET LA CUISINE


Je ne serai pas assez paradoxal pour avancer que boire chacun dans son verre, ne pas manger avec ses doigts, et ne pas puiser à la gamelle avec ses voisins, soient des jouissances positives. Par cela même qu’un usage est général, il ne semble répugnant à personne. Il ne se révèle tel à la foule que le jour où une élite le proscrit. Longtemps nos aïeux furent donc ce que nous nommons aujourd’hui « grossiers » et « malpropres, » riches et pauvres indistinctement ; mais il n’y en avait pas moins entre eux, suivant qu’ils étaient, dans leur rusticité, magnifiques ou misérables, une distance que les derniers siècles avaient accrue et qu’au contraire les découvertes de ces siècles-ci sont en train d’atténuer ou d’abolir.

Il est vrai que les classes d’autrefois, séparées par un abîme ne sentaient pas leur éloignement ; tandis que nos contemporains, à mesure qu’ils se rapprochent, supportent mal ce qui reste entre eux de diversité. Raison de plus pour noter les résultats lentement obtenus, que déjà l’on oublie ou l’on ignore.

  1. Voyez la Revue du 15 novembre 1909