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de l’érosion pluviaire. Le pays se montre donc comme ayant été décapé d’une façon continue par l’eau sauvage et comme ayant laissé, grâce aux épanchemens des laves, des lambeaux de sa surface à différens momens successifs. En rapprochant toutes les indications de ce genre et en les soumettant à la plus sévère critique, on aboutit à cette conclusion dont l’importance n’échappera à personne, que depuis que l’Auvergne est continentale, — c’est-à-dire depuis qu’elle a été soulevée par les forces souterraines au-dessus du niveau de la mer, — elle a perdu 600 mètres d’épaisseur sur toute sa surface, par le fait exclusif de la pluie.


III

Ceci étant acquis et bien acquis, — car on ne peut rien contre les faits observés, sinon négliger de les citer et c’est ce qu’on a fait trop souvent, — nous pouvons aller plus loin et poursuivre notre étude des vallées ordinaires, avec le souci de reconnaître comment leur structure explique l’allure des rivières qui en parcourent le thalweg, spécialement dans les momens d’inondation.

Quand on cherche à refaire l’histoire géologique d’une région analogue au nord de la France, on reconnaît avec certitude qu’elle a constitué un ancien fond de mer, exondé à la suite d’un soulèvement général très lent et continué très longtemps. Il existe, en bien des pays, des exemples de rivages qui subissent en ce moment un mouvement vertical de ce genre : la cause en est dans le refroidissement progressif et dans la contraction consécutive des substances constituant le noyau de la Terre.

Or, un fond de mer émergeant et devenant ainsi une région continentale, éprouve évidemment de grands changemens dans son régime : parmi eux, le plus immédiatement sensible est la réception de la pluie, qui ne pouvait l’atteindre quand il était sous les flots. La goutte de pluie travaille aussitôt le sol sur lequel elle tombe et y réalise des effets variés. D’abord, le choc de la petite sphérule aqueuse déplace de la matière délayable, sable ou argile ; ensuite elle l’accumule en certains points aux dépens de points voisins. Théoriquement, on pourrait croire qu’une pluie régulière tombant sur un sol