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maréchal chez le chargé d’affaires de France pour lui témoigner la peine que me causait cet événement, et lui dire que j’étais aussi affligée que qui que ce soit de l’insulte faite à la livrée de l’Empereur, mon frère, et que j’en avais ordonné une peine bien exemplaire. J’ai vu le soir Grosbois qui m’a paru très bien disposé, et qui maintenant ne peut donner aucune suite à cela parce qu’il a été fait plus qu’il ne pouvait demander. Mais ayant été informée que le consul (de France) avait crié très hautement le matin dans les appartemens contre ce qui venait de se passer, je lui ai dit au cercle du soir que j’étais très étonnée qu’il eût pu se plaindre en public avec autant de violence, qu’il devait savoir que la livrée de l’Empereur était la mienne, et qu’il aurait pu penser que je suffisais pour punir l’insulte qui lui avait été faite. Il a pâli et n’a pu rien répondre. — Ainsi, sois tranquille sur cela, mon cher ami, j’ai fait ce que je devais faire, ce que j’ai cru nécessaire, et il est impossible que cet événement ait aucune suite fâcheuse.

« La veille de la fête, j’ai conduit nos enfans au théâtre du Pardo, où ils ont vu le ballet de Laurette qui les a beaucoup amusés. J’ai été un peu fatiguée des deux cercles d’hier, et pour me délasser je suis allée à minuit me promener en calèche incognito dans Naples avec le maréchal Pérignon. J’avais déjà fait l’un des jours derniers avec lui une petite course à la Villa Réale. C’est le seul instant où il soit possible de respirer.

« Je suis allée voir vendredi dernier l’exposition des objets d’industrie. Je n’y ai rien trouvé de nouveau ; c’est absolument comme l’année dernière.

« J’ai annoncé hier en plein cercle que tu ne tarderais pas à revenir à Naples. Cette nouvelle a fait le plus grand plaisir. C’est demain le jour fixé pour lancer à la mer le vaisseau de Castellamare. J’irai avec nos enfans et ma maison ; il y aura un concours immense. Tout Naples assistera à ce beau spectacle. Après-demain, le vaisseau entrera dans le port de Naples, et il n’aura plus rien à craindre des Anglais.

« Adieu, mon cher ami, je t’embrasse de tout mon cœur. »


IV

La Reine s’était promis de ne point toucher au gouvernement intérieur du royaume et aux choses d’administration pure