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duchesse Calabrita. Je ne veux point de Mme Caramanica parce qu’elle jouit ici d’une très mauvaise réputation pour le jeu. Celles que je préférerais seraient Mme de Gallo, si elle n’est pas malade, la duchesse Civitella, la duchesse d’Atri et la princesse d’Avellino. Tu ne ferais venir les deux autres qu’au refus de deux de celles-ci. Tu leur feras donner quinze mille francs pour leur voyage et une voiture de mes écuries, et elles s’arrangeront pour leurs femmes de chambre. Je ne veux rien entendre de plus. Si tu ne veux pas faire cette dépense, je la paierai sur ma cassette, car l’Empereur veut que j’aie ici une belle cour et des femmes portant un grand nom ; il les désire des plus belles et riches. Tu jugeras sans doute que j’ai fait un bon choix dans les dames que je viens de te désigner. Engage aussi quelques dames à venir pour leur compte, et fais-les partir de suite, car le mariage se fera à la Mi-Carême. Je leur ferai préparer des appartemens chez l’ambassadeur de Naples, ce qui nous fera économiser la dépense. Ces dames feront leur service.

« L’Empereur est très bien pour toi, et, d’après ce qu’il dit, je vois qu’il n’aura jamais l’intention de réunir Naples (à l’Empire). Il dit que Naples est une grande villasse qui ne peut se soutenir que par une cour et qu’elle est trop près de Rome pour qu’il puisse lui en donner une. Il dit aussi que les Napolitains sont trop sujets à se révolter, et surtout les Calabrais, pour que l’on puisse les gouverner de si loin, et qu’il leur faut leur souverain chez eux. Je t’engage beaucoup à venir pour le mariage. Jérôme, le vice-roi[1], Elisa, toute la famille étant réunie, ton absence ferait un bien mauvais effet et fâcherait beaucoup l’Empereur. Tu sais que je serais bien aise de te voir, mais je t’assure que c’est ton intérêt seul qui me fait te presser de venir, parce que l’Empereur serait très mécontent. Si cependant tu avais de fortes oppositions qui t’empêchassent de faire ce voyage, écris-les-moi secrètement, et si cela arrive, écris une lettre charmante à l’Empereur pour t’excuser. Mais, je te le répète, je regarde ton arrivée pour le mariage comme une chose bien utile à nos intérêts.

« L’Empereur est excessivement occupé de sa future ; il en parle à chaque instant et il en est presque amoureux. Toutes les personnes qui étaient opposées à ce mariage sont maintenant

  1. Eugène vice-roi d’Italie.