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d’élémens cellulaires. Nous avons donc là sous les yeux trois degrés. Il y en a davantage. Haeckel était arrivé à en distinguer six, sans sortir du règne animal proprement dit. Il est probable en effet que chacune de nos vertèbres est un individu ayant plus ou moins perdu son indépendance, mais bien reconnaissable ; de même chacun des anneaux des insectes ou des autres articulés en est incontestablement un. Il est probable aussi que chacun de nos organes forme, à sa façon, un tout complet. Haeckel, partant de ce point de vue, était arrivé à distinguer six degrés qu’il appelait : les Cellules ou Plastides, les Organes, les Antimères ou Membres, les Mélamères ou Segmens, les Personnes, et les Colonies ou Cormus.

Le règne végétal présente des séries analogues.

En somme, ces considérations conduisent à une doctrine à laquelle conduit aussi l’étude de la vie microbienne des cellules, phagocytes et autres, constitutives de notre organisme et que les travaux de Metchnikoff ont récemment mises en lumière.

Cette doctrine est celle que l’on a appelée l’animisme polizoïque. Chaque animal est un être ayant sa vie propre et son individualité. Il englobe d’autres animaux, en nombre considérable, beaucoup plus petits que lui, de degré inférieur, faisant partie intégrante de son être, mais ayant aussi leur individualité et leur vie indépendantes.

Laissons de côté la partie la plus intéressante, la plus abstraite, mais aussi la plus redoutable et la plus hasardée des problèmes auxquels cette doctrine donne lieu. Dans quelle mesure le moi, la volonté, la conscience de ces êtres résultans sont-ils dépendans du moi, de la conscience, de la volonté des êtres élémentaires qui concourent à leur formation et à leur existence, et réciproquement ? Dans quelle mesure et à partir de quelle limite la vie, la mort des uns entraînent-elles la vie, la mort des autres ? Où s’arrête le libre arbitre ? Problèmes très élevés et qui ne sont pas près d’être résolus. Ces problèmes, d’ailleurs, sont écartés, mais éludés plutôt que résolus, par d’autres systèmes, le Dynamisme et l’Organicisme, plus matérialistes que l’Animisme polyzoïque. Ces deux systèmes refusent à la force vitale toute existence propre, et la considèrent comme n’étant qu’une simple propriété de la matière ou comme la résultante automatique de la structure ou du jeu des organes.

Bornons-nous, pour le sujet qui nous occupe ici, à constater