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l’épreuve le calme du ministre des Affaires étrangères de France, les Belges reconnurent que le roi des Français savait gouverner. Le frère de M. Charles Rogier, qui avait pris une part, si importante à la Révolution belge et était un des trois membres de la Commission administrative, lui écrivait le 17 février, en faisant le récit de l’audience du Roi :

«… J’en suis encore tout ému ; j’y ai pleuré comme tous ceux qui s’y trouvaient, roi, reine, prince, princesse, voire même ministres. Cette émotion était vraie. La députation d’un peuple venant demander un roi, Louis-Philippe sacrifiant ses désirs et sa volonté à la crainte d’une guerre générale… ce ne fut pas un des devoirs les moins difficiles de la royauté à accomplir que cette audience de refus… »

Le 4 juin, le Congrès de Bruxelles élut roi le prince Léopold, par 152 voix sur 196 voix.

Léopold de Saxe-Cobourg Saalfeld, né en 1790, général au service de la Russie, avait épousé la fille du prince régent d’Angleterre ; il fut naturalisé par acte du Parlement, fait duc de Kendal et feld-maréchal. Devenu veuf en 1817, il habita le château de Claremont et reçut une pension de 50 000 livres sterling.

Élu roi des Belges, Léopold Ier épousa, le 3 août 1832, la princesse Louise-Marie d’Orléans, fille aînée du roi Louis-Philippe. D’origine allemande, Anglais d’adoption, devenu enfin gendre du roi des Français, il réunissait toutes les conditions pour dénouer une situation difficile où se mêlaient tant d’intérêts divers.

Les Belges avaient réalisé leur vœu : ils avaient fondé un royaume capable d’assurer autour d’eux le respect de leur indépendance, et, chez eux, le développement des libertés qui leur étaient chères.


Comte HORACE DE CHOISEUL.