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« La vie, dit-il, c’est une idée ; c’est l’idée du résultat commun pour lequel sont associés et disciplinés tous les éléments anatomiques, l’idée de l’harmonie qui résulte de leur concert, de l’ordre qui règne dans leur action… Ce qui caractérise la machine vivante, ce n’est pas la nature de ses propriétés physicochimiques, c’est la création de cette machine d’après une idée définie… Ce groupement se fait par suite des lois qui régissent les propriétés physicochimiques de la matière ; mais ce qui est essentiellement du domaine de la vie, ce qui n’appartient ni à la physique ni à la chimie, c’est l’idée directrice de cette évolution vitale. »

Ailleurs : « Ici comme partout, tout dérive de l’idée qui seule crée et dirige ; les moyens de manifestation sont communs à toute la nature et restent confondus pêle-mêle comme les caractères de l’alphabet, dans une boîte où une force va les chercher pour exprimer les pensées ou les mécanismes les plus divers… La force vitale dirige des phénomènes qu’elle ne produit pas. »

Et enfin : « Arrivés au terme de nos études, nous voyons qu’elles nous imposent une conclusion très générale, fruit de l’expérience, c’est à savoir qu’entre les deux écoles qui font, des phénomènes vitaux, quelque chose d’absolument distinct des phénomènes physicochimiques et quelque chose de tout à fait identique à eux, il y a place pour une troisième doctrine, celle du vitalisme physique, qui tient compte de ce qu’il y a de spécial dans les manifestations de la vie et de ce qu’il y a de conforme à l’action des forces générales. »

Ce qu’il y a de spécial à la vie et aux êtres vivans, c’est bien l’idée directrice, comme dit Claude Bernard, l’idée-force, dirait Alfred Fouillée, et cette idée directrice, c’est l’idée de la conservation de la vie de l’individu et de l’espèce. Voilà ce qui fait l’unité de l’individu dans la complexité de son organisme et ce qui maintient sa fixité dans la mobilité de son fonctionnement.


Cette conclusion conduit, comme à un corollaire tout naturel, à la proposition suivante qui exprime la thèse même indiquée en tête de cet article : il est scientifiquement permis, après les merveilleuses découvertes de la physiologie et de la physicochimie, de maintenir l’ancienne conception vitaliste de la vie, d’après laquelle les phénomènes vitaux ne peuvent pas