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Pour les pays de haute montagne dont l’essor économique a dû se produire ou se poursuivre en cette période, passagère si l’on veut, mais longue et décisive, force a bien été de niveler les montagnes en les creusant. La Suisse, « plaque tournante de l’Europe,  » avait un besoin impérieux que voyageurs et marchandises vinssent « tourner sur la plaque.  » Elle a dû, pour sauvegarder sa situation économique et politique internationale, demeurer une grande voie de passage du Nord au Sud. Le Gothard et le Simplon sont la double expression de cette nécessité vitale. Or, les destinées de ces deux routes ferrées dépendent des Etats voisins tout autant, sinon plus que de la Suisse elle-même ; et le caractère ainsi que les modalités de ces relations obligées viennent d’être précisément révisés ou fixés au cours de deux conférences internationales qui se sont succédé à Berne, à peu de semaines d’intervalle, en cette même année 1909.


I. — LE GOTHARD ET LA CONFERENCE INTERNATIONALE DU GOTHARD (MARS-AVRIL 1909)

18 juillet 1870, à Berne, au Conseil national (Chambre des députés), séance agitée et âpre qui a marqué dans l’histoire du tunnel du Saint-Gothard une journée décisive.

La mi-juillet 1870 a été, non seulement pour la France et pour la Prusse, mais pour toute l’Europe, une période telle qu’il est permis d’avoir oublié le débat parlementaire helvétique de ce lundi matin, première journée d’une semaine qui devait être celle de la déclaration de guerre franco-allemande..

Les Chambres fédérales avaient été appelées à ratifier le traité conclu à Berne le 15 octobre de l’année précédente entre la Confédération suisse et le Gouvernement royal d’Italie pour la construction d’un chemin de fer par le Saint-Gothard, ainsi que la Convention signée à Berlin le 20 juin 1870 et par laquelle la Confédération de l’Allemagne du Nord y adhérait. Le Conseil fédéral, ou gouvernement de la Suisse, qui avait été le négociateur, était tout acquis au projet ; déjà, devant la Chambre haute ou Conseil des Etats, le Gothard avait été discuté dans les séances des 13 et 14 juillet, et il avait triomphé à une très grande majorité. Lorsque les arrêtés du Conseil fédéral furent transmis au Conseil national qui devait en délibérer, aucun des membres de l’Assemblée, ni parmi les amis zélés du Gothard, ni même parmi